Le GNV chez Casino : une migration dynamique et réfléchie

Le GNV chez Casino : une migration dynamique et réfléchie
En juillet dernier, nous vous annoncions le projet de Casino, par l’intermédiaire de sa filiale logistique Easydis, de déployer en 2 temps, 2017 et 2020, une flotte de 400 camions équipés d’une motorisation au GNV. Directeur général de cette dernière structure, Philippe Enguix fait le point pour Gaz-Mobilité sur un programme qui se veut pionnier et d’envergure.
 

Améliorer le bilan carbone

Une entreprise qui, aujourd’hui, ne se soucierait pas sérieusement de son empreinte carbone sur l’environnement, risquerait bien de devoir faire face à des dépenses colossales dans l’urgence. Le groupe Casino est particulièrement moteur sur le sujet. Philippe Enguix (photo ci-contre) le présente comme « un acteur engagé pour la réduction des gaz à effet de serre ». Il précise : « La direction Transport s’est lancée dans une démarche soutenue depuis 2008 pour améliorer son bilan carbone ».
 
Afin de diminuer les émissions du groupe, l’entité dispose de plusieurs leviers qu’elle active au mieux. Le directeur général d’Easydis passe en revue les principaux : « Optimisation du remplissage des véhicules, rationalisation du nombre de kilomètres parcourus, usage de solutions alternatives et multimodales de transport comme le convoyage par train ou barge ».
 

Du gazole au GNV

Toujours motivée par le souci d’améliorer le bilan carbone du groupe, la direction Transport a décidé de jouer la carte des moteurs moins polluants en modernisant son parc de véhicules qui dessert, en France, les enseignes Géant Casino, Casino Supermarchés, Casino Shop, Vival, Spar, Leader Price Express et Petit Casino.
 
« Plus de 95% de la flotte répond aux normes Euro 5 et supérieure », rapporte Philippe Enguix. Un bon début, mais Casino souhaitait aller plus loin, en visant une réduction des gaz à effet de serre de 20%, au minimum, à horizon 2020, par rapport aux chiffres 2012. C’est ainsi que l’attention du groupe s’est portée sur le gaz naturel pour véhicules. « Aujourd’hui, pour le transport de marchandises, le GNV est la seule alternative au gasoil, concrète, disponible sur le marché, et économiquement viable », plaide notre interviewé.
 
Il chiffre : « Avec du GNV d’origine fossile, c’est déjà 15% d’émissions de CO2 en moins par rapport aux véhicules équivalents de norme Euro 6 alimentés au gasoil, mais avec du BioGNV, le gain monte à 95% ».
 

Se jouer des restrictions de circulation

En prenant par le bon bout, dans sa globalité, et suffisamment en amont, les problèmes causés par les émissions à l’échappement de sa flotte de camions, le groupe Casino anticipe également le durcissement de la législation en termes de restriction de circulation.
 
« De plus en plus de communes et d’agglomérations projettent de restreindre l’accès de leurs centres-villes aux véhicules polluants », rappelle Philippe Enguix, citant spontanément Aix-en-Provence (13), Saint-Etienne (42), et Paris. D’ici 2020, en raison des épisodes de pics de pollution, toujours plus nombreux et étalés, comme ceux que nous connaissons en France au moment même de la rédaction du présent article, la liste des zones urbaines concernées par les restrictions de circulation se sera lourdement allongée.
 
« A moyen terme, la plupart des accès aux centres-villes seront fermés au gasoil », prévient notre interviewé. « Rouler au GNV nous permettra de continuer à y assurer nos livraisons », prévoit-il.
 
Au sein du groupe Casino, le mouvement de conversion de la flotte s’est accéléré depuis la loi de transition énergétique pour la croissance verte, et depuis la COP21 qui avait Paris pour cadre. « Ces éléments de contexte viennent renforcer l’intérêt de notre démarche de déploiement de véhicules GNV », commente le directeur général d’Easydis.
 

Partenariat vertueux avec le transporteur Jacky Perrenot

Depuis 2015, Easydis exploite en Rhône-Alpes, par l’intermédiaire de son partenaire transport Jacky Perrenot, dix semi-remorques pilotes roulant au GNL.
 
« Cette expérimentation menée en situations réelles pour la livraison des magasins du groupe confirme que les véhicules GNV peuvent être une véritable alternative au gasoil », relate Philippe Enguix. « Pour rappel, les modèles en test sont des Iveco Stralis 330 ch GNL/C », tient-il à préciser.
 
De nombreux points positifs ont été relevés à l’utilisation de ces camions. « Les chauffeurs ont mis en avant des véhicules silencieux, avec peu de vibrations causées par le moteur, et une conduite plus agréable », expose notre interviewé. Plus globalement, il détaille : « L’usage du GNV est adapté à la grande majorité de nos missions de transport, avec un gain de consommation de l’ordre de 10% par rapport à une alimentation au gasoil, et une réduction des émissions de CO2, des oxydes d’azote et des particules, preuves à l’appui ».
 
A tout cela s’ajoute encore une baisse des nuisances sonores. « Elles sont divisées par 2 », se réjouit-il. « Les véhicules GNV sont naturellement silencieux : < 72 et 62 dB respectivement pour les gammes Scania et Iveco », témoigne le directeur général d’Easydis.

Mieux encore

En plus du Stralis 330 ch, le groupe Casino a pu expérimenter un modèle plus puissant, toujours au catalogue Iveco : le Stralis 400 ch.
 
« Cette version répond à l’ensemble des points de faiblesse relevés sur les anciennes générations », affirme Philippe Enguix. Il énumère: « Autonomie renforcée, avec de nouveaux réservoirs et une réduction des consommations de gaz ; boîte de vitesses robotisée procurant beaucoup de souplesse ; puissance moteur renforcée permettant de maintenir une allure comparable à celle d’un véhicule alimenté au gasoil, y compris à pleine charge et sur des routes en montagne ».
 
Pour ce modèle, il conclut : « Ce véhicule peut répondre à 100% des flux opérés par Casino ! ». Au fait, pourquoi Iveco ? « Aujourd’hui, le marché du véhicule routier GNV est très limité ; seul Iveco propose une gamme étendue de modèles alimentés avec ce carburant gazeux », justifie notre interviewé. « Nous n’imposons pas de matériel à nos transporteurs, mais nous sommes en mesure de les conseiller sur les modèles, et surtout sur les choix et dimensionnements des réservoirs, afin de garantir l’autonomie suffisante pour nos livraisons », tient-il à souligner.

 

Le GNV s’affiche

D’autres programmes de tests sont-ils prévus ? A cette question que nous lui avons posée, Philippe Enguix répond : « Non ! Les résultats du pilote confirment l’intérêt et la faisabilité du programme ». Il complète : « La dynamique positive autour du gaz, portée par l’ensemble de la filière GNV (constructeurs, fournisseurs, transporteurs et chargeurs) vient appuyer notre décision ».
 
Puisque la phase d’expérimentation s’achève, le déploiement de la nouvelle flotte de camions sans gasoil, roulant exclusivement au GNV et BioGNV, va commencer, dès janvier prochain. L’objectif est de faire circuler une première tranche de 200 véhicules GNV au cours de l’année 2017, puis autant de plus à horizon 2020. « En les floquant, Casino va afficher clairement que le groupe s’engage lui aussi dans la lutte contre la pollution de l’air et met en avant une certaine idée du transport durable », commente notre interviewé.
 

GNL & GNC

« GNL/GNC : Il s’agit du même carburant qui alimente un même type de moteurs », rappelle Philippe Enguix. « Seuls le stockage et le mode d’approvisionnement changent : liquéfié pour le GNL et compressé pour le GNC », précise-t-il, avant d’ajouter : « Pour un même volume de stockage de carburant, on peut embarquer 3 fois plus de volume de GNL que de GNC ».
 
Alors pourquoi exploiter ces 2 formes du GNV en une même flotte ? « Le GNL répond à la question de l’autonomie, et sera déployé en priorité pour les véhicules de type tracteurs assurant les livraisons régionales sur l’ensemble du territoire avec des kilométrages journaliers importants ; le GNC, et d’ailleurs, pour la flotte du groupe Casino le BioGNC, sera utilisé plus particulièrement pour les porteurs en charge des livraisons urbaines », différencie le directeur général d’Easydis.

 

8 stations

Easydis prévoit l’ouverture de 8 stations de gaz au niveau national pour alimenter son parc de camions GNV dès janvier 2017. « L’avitaillement se fera quasi exclusivement sur ce réseau de 8 stations, et sur ceux de nos 2 fournisseurs Avia/Primagaz et Air Liquide », explique Philippe Enguix.
 
« Si ces 2 partenaires ont été retenus dans le cadre du projet GNV Casino, c’est qu’ils répondent à l’ensemble des critères de qualité, sécurité et économique attendus », révèle-t-il.
 
« Nous nous appuyons sur ces 2 fournisseurs pour déployer notre réseau d’avitaillement, et, le cas échéant, l’étendre encore », poursuit-il. « Nos 8 stations, implantées à proximité de nos sites pour éliminer au maximum les kilomètres parcourus à vide, et en mesure de délivrer chacune du GNC et du GNL, seront toutes publiques, c’est-à-dire ouvertes à d’autres transporteurs », nous apprend-il. Pourquoi ce choix ? A cette question, notre interlocuteur développe : « Notre objectif secondaire est d’être acteur dans le déploiement de la filière GNV. C’est aussi pour cette raison que les stations seront mixtes (à la fois GNL et GNC). Elles seront toutes, également, équipées pour distribuer de l’azote liquide afin d’approvisionner en froid les véhicules réfrigérés ».

Un programme aidé ?

« Le programme du groupe Casino d’exploitation du GNV pour sa flotte de camions de livraison ne s’inscrit dans aucun programme français ou européen particulier », relève Philippe Enguix.
 
« Certaines de nos stations restent cependant éligibles pour être adressées à un programme européen », évoque-t-il. « Nous souhaitions être précurseurs, et nous restons évidemment en veille sur le sujet : Nous n’avons pas attendu les aides pour nous lancer dans le projet, ni des constructeurs, ni des pouvoirs publics, ni de la filière GNV », soutient notre interviewé.
 
Concernant cette dernière, notamment portée par l’AFGNV, il rend un hommage particulier : « Elle suit avec grand intérêt notre projet et ceux de nos confrères, et met tout en œuvre pour faciliter et favoriser le déploiement de la branche ; elle fait surtout le nécessaire auprès de l’Etat français pour défendre les intérêts autour de ce gaz et se pérenniser dans les années à venir, notamment en sécurisant la fiscalité du GNV ».
 
Gaz Mobilité et moi-même remercions Philippe Enguix pour sa disponibilité, mais aussi Rebecca Hébert, chargée de communication corporate au sein du groupe Casino, pour son suivi efficace.
 
 

Partager cette page
Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

A lire également

Ajouter un commentaire