Fin de contrat : quel avenir pour les unités de cogénération en France ?
Face à la fin des contrats subventionnés et aux réformes réglementaires récentes, les unités de méthanisation en cogénération vont devoir se réinventer. Nicolas Bréziat, fondateur d’Indiga, décrypte les opportunités mais aussi les nombreux défis à relever pour passer à l’injection de biométhane.
Le paysage de la méthanisation en France est en train de vivre une bascule. Jusqu’à récemment, nombre d’unités agricoles produisaient de l’électricité et de la chaleur via la cogénération, bénéficiant de contrats d’achat subventionnés sur 15 ans. Alors que celles arrivant en fin de contrat allaient devoir basculer vers d’autres modes, l’arrêté du 8 septembre 2025 va encore plus loin.
«â€¯L'arrêté du 8 septembre vient libérer la quasi-totalité des méthanisations en cogénération en leur offrant cette possibilité de changer de mode de valorisation » résume Nicolas Bréziat, fondateur d’Indiga, jeune société de services dont l’objectif est de faire lien entre le monde des agriculteurs et celui des industriels.
Surtout et en dehors de certains projets engagés, plus aucun nouveau contrat de rachat d’électricité produite à partir de biogaz ne pourra être signé à l’avenir. Un choix pragmatique de l’Etat qui préfère s’appuyer sur l’éolien et le solaire pour assurer une production électrique décarbonée à moindre coût. « Il est beaucoup plus malin d'utiliser le gaz pour ce qu'il est, c'est-à-dire de le mettre dans le réseau pour décarboner et remplacer des énergies fossiles » note le responsable d’Indiga.
Un bouleversement de taille pour les quelque 1100 unités de cogénération recensées dans l’Hexagone qui vont devoir, au terme de leur contrat, trouver un moyen de se réinventer.
D'autres contraintes s’ajoutent : des équipements à remettre aux normes, le remplacement de certaines pièces usées après 15 ans de fonctionnement, ou encore une distance au réseau parfois prohibitive. « Sur les distances de raccordement, on estime d’une manière générale qu'il faut être en dessous de 10 kilomètres ».
Autre problématique identifiée : celle du volume de production. « Pour les petites unités, il faudra trouver plus de matière pour augmenter sa production et arriver à un seuil de rentabilité » estime le responsable d’Indiga qui estime qu’il faut, au minimum, environ 100 Nm³/h de débit, soit 10 GWh/an, pour justifier un passage à l’injection. En deçà, difficile d’amortir les coûts.
«â€¯Les méthanisations qui sont trop petites ou qui sont trop loin des réseaux n'ont pas, aujourd’hui, des conditions économiques qui permettent une conversion et un raccordement au réseau » résume Nicolas Bréziat.
Même pour les unités techniquement aptes à s’adapter, la rentabilité n’est pas toujours au rendez-vous. Car pour basculer vers l’injection, encore faut-il trouver un débouché pour le biométhane produit. Alors que les contrats de gré à gré – ou BPA – peinent à décoller en France, reste le nouveau levier des CPB (certificats de production de biogaz), qui obligeront les fournisseurs à incorporer une part de gaz vert dans leur mix à partir de 2026. Ce mécanisme commence à faire émerger une dynamique, mais reste trop jeune et instable pour rassurer les investisseurs. «â€¯Les CPB ne sont définis actuellement que sur trois ans. [...] On a besoin que le gouvernement définisse le mécanisme de CPB sur une durée beaucoup plus longue pour débloquer des investissements significatifs », plaide Nicolas Bréziat.
« Compte tenu des contraintes de taille d’exploitation, une bonne moitié des cogénérations existantes [...] risqueraient de ne pas pouvoir basculer vers l’injection » prévient Nicolas Bréziat qui estime que la bascule de la cogénération vers l’injection pourrait à terme ajouter 6 à 7 TWh de capacité supplémentaire dans l’Hexagone.
La production de bioGNV à la ferme suscite aussi de l’intérêt, notamment pour décarboner les engins agricoles et le commercialiser auprès d’autres acteurs du territoire. Là encore, le modèle économique reste à démontrer : « Il faut épurer et comprimer. Cela coûte de l'argent », rappelle-t-il, pointant également les contraintes opérationnelles. « Faire du bioGNV pose des questions de gestion de flux. Un méthaniseur produit en continu. Arriver à trouver tous les clients qui vont acheter ce bioGNC, dans les mêmes volumes, au même moment, ce n'est pas évident ». Sans compter les problématiques d’accès à des sites agricoles parfois limités à de simples chemins non accessibles aux poids lourds qui pourraient être clients.
Mais il reconnaît que tous n’auront pas cette chance. Il faudra alors miser sur des alternatives encore à affiner, ou espérer un futur élargissement du réseau. «â€¯GRDF et NaTran font des efforts considérables pour déployer le réseau. Une unité qui n'est pas raccordable aujourd'hui, le sera peut-être dans trois ou cinq ans », tempère-t-il.
Pour faciliter les investissements et le passage à l’injection, le secteur doit aussi se structurer. «â€¯Il faut que la filière se professionnalise aussi pour gagner en productivité », juge Nicolas Bréziat. Afin de ne pas avoir à porter seuls l’investissement, les agriculteurs pourraient aussi recourir à de nouveaux modes de financements. En matière d’investissement, des sociétés comme CVE ou la jeune entreprise NEIOS, s’emploient à co-investir dans des unités agricoles et pourraient soutenir la bascule vers l’injection.
Le paysage de la méthanisation en France est en train de vivre une bascule. Jusqu’à récemment, nombre d’unités agricoles produisaient de l’électricité et de la chaleur via la cogénération, bénéficiant de contrats d’achat subventionnés sur 15 ans. Alors que celles arrivant en fin de contrat allaient devoir basculer vers d’autres modes, l’arrêté du 8 septembre 2025 va encore plus loin.
«â€¯L'arrêté du 8 septembre vient libérer la quasi-totalité des méthanisations en cogénération en leur offrant cette possibilité de changer de mode de valorisation » résume Nicolas Bréziat, fondateur d’Indiga, jeune société de services dont l’objectif est de faire lien entre le monde des agriculteurs et celui des industriels.
Surtout et en dehors de certains projets engagés, plus aucun nouveau contrat de rachat d’électricité produite à partir de biogaz ne pourra être signé à l’avenir. Un choix pragmatique de l’Etat qui préfère s’appuyer sur l’éolien et le solaire pour assurer une production électrique décarbonée à moindre coût. « Il est beaucoup plus malin d'utiliser le gaz pour ce qu'il est, c'est-à-dire de le mettre dans le réseau pour décarboner et remplacer des énergies fossiles » note le responsable d’Indiga.
Un bouleversement de taille pour les quelque 1100 unités de cogénération recensées dans l’Hexagone qui vont devoir, au terme de leur contrat, trouver un moyen de se réinventer.
De la cogénération à l’injection : des défis techniques et économiques majeurs
Passer de la cogénération à l’injection n’a rien d’automatique. « Toutes les unités ne pourront pas suivre » prévient Nicolas Bréziat. Le premier obstacle est d’ordre financier. Car passer à l’injection nécessitera de nouveaux investissements. «â€¯Il faut acheter un épurateur, soit environ un million d’euros voire plus selon la taille du projet, mais aussi contribuer au raccordement au réseau. On est sur des projets entre 1,5 million pour les plus petits jusqu'à 3-4 millions d'euros » chiffre notre interlocuteur.D'autres contraintes s’ajoutent : des équipements à remettre aux normes, le remplacement de certaines pièces usées après 15 ans de fonctionnement, ou encore une distance au réseau parfois prohibitive. « Sur les distances de raccordement, on estime d’une manière générale qu'il faut être en dessous de 10 kilomètres ».
Autre problématique identifiée : celle du volume de production. « Pour les petites unités, il faudra trouver plus de matière pour augmenter sa production et arriver à un seuil de rentabilité » estime le responsable d’Indiga qui estime qu’il faut, au minimum, environ 100 Nm³/h de débit, soit 10 GWh/an, pour justifier un passage à l’injection. En deçà, difficile d’amortir les coûts.
«â€¯Les méthanisations qui sont trop petites ou qui sont trop loin des réseaux n'ont pas, aujourd’hui, des conditions économiques qui permettent une conversion et un raccordement au réseau » résume Nicolas Bréziat.
Même pour les unités techniquement aptes à s’adapter, la rentabilité n’est pas toujours au rendez-vous. Car pour basculer vers l’injection, encore faut-il trouver un débouché pour le biométhane produit. Alors que les contrats de gré à gré – ou BPA – peinent à décoller en France, reste le nouveau levier des CPB (certificats de production de biogaz), qui obligeront les fournisseurs à incorporer une part de gaz vert dans leur mix à partir de 2026. Ce mécanisme commence à faire émerger une dynamique, mais reste trop jeune et instable pour rassurer les investisseurs. «â€¯Les CPB ne sont définis actuellement que sur trois ans. [...] On a besoin que le gouvernement définisse le mécanisme de CPB sur une durée beaucoup plus longue pour débloquer des investissements significatifs », plaide Nicolas Bréziat.
6 à 7 TWh de capacités supplémentaires
Selon une étude de Solagro, 78 % des unités de cogénération seraient à une distance raisonnable du réseau, mais cela ne suffit pas.« Compte tenu des contraintes de taille d’exploitation, une bonne moitié des cogénérations existantes [...] risqueraient de ne pas pouvoir basculer vers l’injection » prévient Nicolas Bréziat qui estime que la bascule de la cogénération vers l’injection pourrait à terme ajouter 6 à 7 TWh de capacité supplémentaire dans l’Hexagone.
Des solutions en développement, mais encore peu matures
Pour les unités non raccordables, certaines pistes alternatives commencent à émerger… mais elles restent au stade expérimental. Abordées par des acteurs comme Sublime Energie ou Methagora, la solution du gaz porté, sorte de « tournée des laitiers des petits méthaniseurs », se dessine. « Il y a aussi l'approche d'Energo qui envisage de transformer le biogaz en biométhanol. C'est assez malin car le méthanol a l'avantage d'être liquide, facilement stockable et transportable » souligne Nicolas Bréziat.La production de bioGNV à la ferme suscite aussi de l’intérêt, notamment pour décarboner les engins agricoles et le commercialiser auprès d’autres acteurs du territoire. Là encore, le modèle économique reste à démontrer : « Il faut épurer et comprimer. Cela coûte de l'argent », rappelle-t-il, pointant également les contraintes opérationnelles. « Faire du bioGNV pose des questions de gestion de flux. Un méthaniseur produit en continu. Arriver à trouver tous les clients qui vont acheter ce bioGNC, dans les mêmes volumes, au même moment, ce n'est pas évident ». Sans compter les problématiques d’accès à des sites agricoles parfois limités à de simples chemins non accessibles aux poids lourds qui pourraient être clients.
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Interview : Sublime Energie veut convertir la tournée du laitier au bioGNL
Quelle stratégie pour les agriculteurs ?
Que conseiller à un agriculteur arrivé en fin de contrat ? « Il faut se poser les bonnes questions. Est-ce que je suis raccordable ? Est-ce que ma production est suffisante pour me raccorder au réseau ? Si la réponse est oui à ces deux questions, il ne faut pas hésiter et basculer à l'injection », recommande Nicolas Bréziat. Non seulement pour une meilleure rentabilité, mais aussi pour faciliter l’exploitation. «â€¯Les moteurs de cogénération, c'est un peu un cauchemar à opérer. L'injection est beaucoup plus tranquille » pointe notre interlocuteur.Mais il reconnaît que tous n’auront pas cette chance. Il faudra alors miser sur des alternatives encore à affiner, ou espérer un futur élargissement du réseau. «â€¯GRDF et NaTran font des efforts considérables pour déployer le réseau. Une unité qui n'est pas raccordable aujourd'hui, le sera peut-être dans trois ou cinq ans », tempère-t-il.
Pour faciliter les investissements et le passage à l’injection, le secteur doit aussi se structurer. «â€¯Il faut que la filière se professionnalise aussi pour gagner en productivité », juge Nicolas Bréziat. Afin de ne pas avoir à porter seuls l’investissement, les agriculteurs pourraient aussi recourir à de nouveaux modes de financements. En matière d’investissement, des sociétés comme CVE ou la jeune entreprise NEIOS, s’emploient à co-investir dans des unités agricoles et pourraient soutenir la bascule vers l’injection.
A propos d'Indiga
INDIGA a construit une proposition de valeur axée sur la commercialisation de biométhane agricole via des contrats de gré à gré. Elle accompagne les producteurs de biogaz dans la conversion de leurs unités de méthanisation en cogénération et aide les industriels et énergéticiens à sourcer des volumes importants de biométhane pour répondre à leur stratégie de décarbonation. INDIGA propose également une activité de conseil à destination de sociétés qui souhaitent développer des partenariats avec l’écosystème biogaz. En savoir plus
INDIGA a construit une proposition de valeur axée sur la commercialisation de biométhane agricole via des contrats de gré à gré. Elle accompagne les producteurs de biogaz dans la conversion de leurs unités de méthanisation en cogénération et aide les industriels et énergéticiens à sourcer des volumes importants de biométhane pour répondre à leur stratégie de décarbonation. INDIGA propose également une activité de conseil à destination de sociétés qui souhaitent développer des partenariats avec l’écosystème biogaz. En savoir plus
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