Rétrofit bioGNV : CRMT prêt à monter en puissance sur l'autocar
A la demande de Transdev et de la région Pays de la Loire, CRMT vient de livrer un autocar scolaire rétrofité au gaz naturel. Un projet structurant pour la société d'ingénierie lyonnaise, qui entre dans une nouvelle phase d'industrialisation avec des kits prêts à déployer et une réflexion autour du passage à l'échelle.
A la demande de Transdev et de la région Pays de la Loire, CRMT livrait il y a quelques semaines un autocar scolaire rétrofité au gaz naturel. Un projet structurant pour la société d'ingénierie lyonnaise, qui entre dans une nouvelle phase d’industrialisation avec des kits prêts à déployer et une réflexion autour du passage à l’échelle.
L’histoire commence il y a trois ans avec un premier projet de rétrofit sur base Iveco Crossway réalisé pour l’opérateur Berthelet. « C’était un projet expérimental sur une base de véhicule Euro 5. A l’époque, la conversion avait été effectuée avec un moteur Cursor 8 GNV », se souvient Quentin Depoorter, responsable du bureau d’études.
Un premier démonstrateur qui a permis de valider la faisabilité technique du projet, allant jusqu’à traverser la France pour retenir l’attention de la région Pays de la Loire. « La région est très friande de gaz naturel et de biométhane », note Quentin Depoorter. « Ils sont venus nous rencontrer, et ils nous ont demandé s'il y avait la possibilité de faire la même chose sur des autocars un peu plus récents, en Euro 6. »
Rétrofit bioGNV : la région Pays de la Loire pionnière avec la conversion de cet autocar diesel Euro VI
Un remplacement moteur « standard »
Comme pour le premier rétrofit, le choix technologique s’est porté sur un remplacement complet du moteur. « On a acheté auprès d’Iveco le moteur équivalent, un Tector 7 Euro 6 Step E, qui fonctionne au GNC et on l’a intégré dans le véhicule » résume notre interlocuteur. Une démarche plus simple que l’adaptation d’un moteur diesel existant. Plus complexe, la solution avait déjà été appliquée par les équipes du CRMT sur la balayeuse GNV développée pour Europe Service.« En reprenant un moteur existant, on n’a pas eu à modifier les pièces internes du moteur » souligne Quentin Depoorter. Pour autant, cet échange moteur ne s’apparente pas à une simple opération de remplacement. « Il y a des connexions à refaire, des tuyaux d’échappement, des tuyaux d’air… ».
Surtout, l’interfaçage électronique a dû être entièrement revu. À la différence d’un rétrofit électrique ou hydrogène, où tout est à inventer, les équipes du CRMT ont dû composer avec un existant strict et normé. « Le véhicule existant est prévu pour fonctionner avec un moteur diesel spécifique, qui parle à son calculateur. Il faut donc recréer tous les liens pour que les bons messages remontent » résume notre interviewé. Un développement complexe pour lequel CRMT a pu compter sur l’appui technique des équipes d’Iveco.
Jusqu’à 300 km d’autonomie
Au-delà du moteur, le rétrofit comprend aussi l’intégration d’un nouveau système de stockage. Sur l’autocar livré à la Région Pays de la Loire, le choix a été d’intégrer les réservoirs dans la soute. Rendue possible dans le cadre d’un usage scolaire, où les soutes sont peu utilisées, la solution a permis d’éviter une modification structurelle plus complexe. « On ne vient pas mettre le stockage sur le toit du véhicule comme cela est fait en première monte chez Iveco, ce qui aurait engendré des difficultés supplémentaires pour l’homologation ».Pure coïncidence : comme sur les modèles neufs commercialisés par Iveco, CRMT a retenu des réservoirs GNC fournis par l’équipementier britannique Luxfer. Les références utilisées sont toutefois différentes. Leur positionnement également. Là où Iveco place ses réservoirs dans le sens de la marche, CRMT les a disposés transversalement.
Au total, l’autocar rétrofité du CRMT embarque quatre réservoirs de 135 litres, embarquant ainsi une capacité utile de près de 100 kg de gaz. « En autonomie, l'objectif était de pouvoir faire 250 à 300 kilomètres par jour sur des cycles de transports scolaires, avec des arrêts fréquents » résume Quentin Depoorter. « Pour emmener le véhicule aux services d’homologation, on réalisait régulièrement le trajet Paris-Lyon par l’autoroute. Nous étions à vide, mais parvenions largement à atteindre les 300 kilomètres d'autonomie ».
Homologation : un prototype duplicable à volonté
Le véhicule a été homologué en France dans le cadre d’un agrément prototype via les services de l’UTAC et de la DREAL Auvergne-Rhône-Alpes. « On a obtenu un PV d’agrément de prototype qui nous permet de dupliquer la solution autant de fois qu'on le veut sur des véhicules identiques. » En clair : si l'on reste sur le même châssis, moteur et configuration de base, la procédure est simplifiée.Et en cas de différence pour la configuration de base du véhicule ? « Dans ce cas, il faudra repasser certains essais d’homologation pour faire les extensions nécessaires à inclure ces autres variantes de véhicule. » Certains essais d’homologation sont génériques, d’autres dépendent des spécificités techniques.
Se projetant au-delà des frontières de l’Hexagone, CRMT imagine aussi une homologation européenne, qui permettrait une commercialisation dans d’autres pays européens. « Cela nous ouvrirait des marchés comme l’Espagne ou l’Italie, où le gaz est bien implanté » imagine Quentin Depoorter.
Au-delà du modèle, c’est l’état du véhicule qui conditionne la faisabilité d’un rétrofit. L’investissement ne se justifie que si la structure, les équipements et les organes essentiels du véhicule sont encore en bon état. « Il faut que la carrosserie soit propre, que les trains roulants soient sains, de manière générale l’autocar doit être en bon état pour les éléments qui ne seront pas remplacés par le rétrofit… sinon, autant repartir sur du neuf », avertit Quentin Depoorter.
C’est pourquoi le CRMT oriente ses solutions vers des véhicules de génération relativement récente, comme les Euro 6, encore loin de la fin de vie fonctionnelle.
Une conversion en une à deux semaines, à 50 % du prix du neuf
Si elle dépendra forcément des volumes, la conversion d’un autocar diesel au bioGNV représente aujourd’hui un coût « autour de 140 à 150 000 € TTC par véhicule », soit d’environ 50 % du prix d’un autocar au gaz neuf, chiffre Quentin Depoorter. Sur le système installé, CRMT propose une garantie de deux ans. « Comme une grande partie des pièces utilisées sont d’origine Iveco, cela donne une certaine sérénité au client quant à leur disponibilité » souligne notre interlocuteur.Dans ses locaux de Dardilly, en périphérie de Lyon, CRMT est déjà prêt à augmenter la cadence. Quel délai pour une conversion complète ? « On vise deux semaines d’immobilisation, avec l’objectif de descendre à une semaine quand le rythme sera plus fluide » nous répond l’ingénieur.
En cas de montée en charge, CRMT envisage plusieurs solutions. Outre la potentielle l’exploitation d’un site voisin de ses locaux, la mise en place de partenariats locaux avec les garages Iveco est également en discussion. « On pourrait faire faire les rétrofits directement dans les ateliers Iveco partenaires. Eux s’occupent du montage, nous nous fournissons le kit et de la formation » résume Quentin Depoorter. Un maillage qui permettrait de gagner en efficacité, tout en rassurant les clients par la proximité du SAV.
D’autres projets dans les cartons
CRMT prépare déjà l’étape suivante. « Nous travaillons sur un kit pour les Crossway équipé d’un moteur Cursor 9, plus puissants. Nous sommes déjà en discussion avec un exploitant. S’il y a besoin d’accélérer, nous serions en capacité de passer à la vitesse supérieure pour avoir un kit homologué en fin d’année » imagine le représentant du CRMT.Si CRMT a concentré ses efforts sur l’Iveco Crossway, dont les volumes en circulation sont particulièrement importants, l’entreprise n’exclut pas d’adapter son kit à d’autres marques. « On a des contacts avec d’autres constructeurs, en France et à l’étranger » nous explique Quentin Depoorter sans entrer dans le détail des discussions, confidentielles à ce stade.
De façon générale, le CRMT reste en mesure de convertir tous types de véhicules, y compris des poids lourds, à partir du moment où il y a de la demande. L’entreprise ne limite pas non plus son offre au gaz. « On a réalisé un rétrofit bioéthanol sur un enjambeur de vigne. Ce qui nous distingue, c’est qu’on a tous les métiers en interne : mécanique, électronique, électrique, calibration… » Un savoir expert qui permet à la PME lyonnaise de livrer des projets complexes avec agilité.
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