Camions et utilitaires GNV : quel bilan pour Eurotranspharma ?

Camions et utilitaires GNV : quel bilan pour Eurotranspharma ?
Comme tous les transporteurs et logisticiens, Eurotranspharma a placé la réduction de ses émissions de CO2 au cœur de sa stratégie. Les enjeux sont multiples : répondre aux demandes des clients d’assurer des livraisons propres, anticiper les futures politiques environnementales, et bien sûr rester compétitifs. Samuel Alouin, Directeur Général France d’Eurotranspharma, nous raconte en quoi le GNV satisfait les besoins techniques de l’entreprise mais souffre d’importants aléas.

 Pouvez-vous nous présenter l'activité d'Eurotranspharma  ?

Samuel Alouin : Eurotranspharma est le premier réseau européen dédié à la livraison des produits de santé sous température dirigée. Nous sommes certifiés Bonnes Pratiques de Distribution des produits pharmaceutiques et nous livrons exclusivement les professionnels de santé, tels que les hôpitaux, les cliniques, les pharmacies, les vétérinaires, ainsi que les grossistes répartiteurs. Notre flotte de véhicules comprend des véhicules légers et des poids lourds.

Eurotranspharma, qui fait partie du groupe Walden, est le leader dans le transport de produits de santé sous température dirigée et nous opérons sur toute la France, avec 23 agences de distribution et 4 hubs. Nous sommes également présents dans 8 autres pays européens.

Quand l'intérêt du groupe pour les véhicules au GNV a-t-il commencé ?

S.A. : Depuis notre création en 2011, nous avons toujours veillé à avoir une flotte récente et répondant aux dernières normes en termes d’émission. Notre engagement dans les véhicules roulant au GNV a débuté en 2020 avec quelques véhicules pilotes. À la fin de l'année 2020, nous avons accéléré notre démarche en passant commande d'une quarantaine de véhicules, que nous avons reçus au début de 2023. Actuellement, nous disposons donc d'environ quarante véhicules au GNV, ce qui représente 10 % de notre flotte dédiée à la livraison de produits pharmaceutiques en température dirigée.
Réduire notre empreinte carbone est une priorité pour l’entreprise.

Nous nous sommes fixés l’objectif ambitieux de faire baisser nos émissions de CO2 d'au moins 40 % d'ici à 2030. Le GNV est l’une des solutions étudiées, en particulier avec l’utilisation de biogaz. En tant que transporteur spécialisé dans la distribution pharmaceutique, nous avons une densité de points de livraison moins importante que d'autres transporteurs, ce qui implique des kilométrages moyens plus élevés. S’ajoutent à cela deux compartiments froids pour la température dirigée, ce qui requiert une autonomie plus importante.

Le GNV s'est avéré être une option intéressante pour nous, car les véhicules de moins de 3,5 tonnes en température dirigée ont une autonomie de plus de 250 km. Lors de notre décision d’investir plus massivement, les solutions au gaz étaient économiquement comparables à celles du diesel, avec une réelle volonté de développer l’approvisionnement, ce qui rendait cette transition naturelle.

Quels types de véhicules GNV avez-vous choisis ?

S.A. : Nous avons opté pour une variété de véhicules roulant au GNV afin de répondre à nos différents besoins opérationnels. Notre flotte GNV comprend une quarantaine de véhicules légers en châssis cabine ou fourgons d'une capacité de 20 et 12 m³, fournis par la marque Iveco ; trois poids lourds de 7,2 tonnes, que nous utilisons dans les zones urbaines avec des contraintes de circulation, également fournis par Iveco; trois poids lourds de 19 tonnes et un semi-remorque, fournis par la marque SCANIA.

 
Êtes-vous satisfaits des performances des véhicules roulant au GNV ?

S.A. : Dans l'ensemble, oui, même si nous avons rencontré quelques problèmes de retard de livraison des camionnettes en raison de la crise sanitaire ! Une fois en service, ces véhicules nous ont permis de faire des tournées normales.

Initialement, nos chauffeurs ont trouvé certains aspects surprenants, tels que le bridage de la vitesse à 90 km/h pour optimiser la charge utile. Ils ont également dû s'adapter au ravitaillement quotidien en gaz, mais ils se sont rapidement habitués à la conduite des véhicules. Globalement, leurs retours sont très positifs.

Comment vous approvisionnez-vous en GNV ?

S.A. : Avec une flotte répartie au sein de 23 agences en France, nous privilégions les stations-services à proximité de nos sites. Malheureusement, il y a encore un nombre insuffisant de stations GNV, et certaines ouvertures prévues fin 2020 ont été annulées, ce qui pose des problèmes pour les métropoles mal desservies. De surcroit, l’offre certifiée biogaz reste limitée et mériterait d’être développée. Ainsi, nous avons été contraints de revoir l’affectation géographique de notre flotte gaz.

Aujourd’hui, qu’est-ce qui retient Eurotranspharma ​de commander davantage de camions GNV ?

S.A. : L'une des raisons est le maillage insuffisant des stations de ravitaillement en GNV et en biogaz. Cela limite notre capacité à assurer les tournées sur certains territoires. En outre, l'augmentation rapide du prix du gaz nous a incités à être plus prudents dans nos investissements futurs. Nous avons dû prendre en compte les incertitudes liées à cette situation. C’est pourquoi nous avons décidé d'attendre les résultats et les performances des premiers véhicules roulant au GNV que nous avons reçus en début d'année avant de prendre de nouvelles décisions.


Justement, face à cette augmentation des prix du gaz, comment la stratégie de décarbonation de la flotte d'Eurotranspharma a-t-elle évolué ?

S.A. :  Le conflit entre l’Ukraine et la Russie a engendré une hausse importante du prix du gaz et de l’électricité pour les entreprises. Ceci pose des questions sur le choix de nos énergies et remet en cause le choix du GNV. Comme ses clients, Eurotranspharma est prête à fournir des efforts pour décarboner les livraisons, mais ils doivent être raisonnables, au risque de déséquilibrer les fondamentaux économiques de l’entreprise.

Ceci, ajouté aux caps évolutifs et parfois changeant fixés par nos gouvernants, nous incite à être prudents quant au choix des technologies les plus adaptées. Celles-ci seront celles qui assureront les meilleurs équilibres entre nos performances de livraison et la réduction de notre impact environnemental. Notre cellule d'achat de véhicules suit attentivement les évolutions technologiques.

Utilisez-vous d'autres carburants alternatifs que le GNV ou envisagez-vous de le faire ?

S.A. : Oui, nous explorons d'autres options. Actuellement, nous menons des tests avec des partenaires utilisant des biocarburants à base d'huile de colza. Cependant, cela soulève la question de l'utilisation des ressources agricoles pour la production de ces carburants. Sur le secteur BENELUX, des essais sont en cours avec du HVO, une option qui pourrait être intéressante car elle peut être utilisée dans les moteurs thermiques et utilise les huiles usagées. Toutefois en France, elle nécessite l’installation de cuves.

Nous avons également testé des poids lourds électriques et nous sommes attentifs aux appels à candidatures lancés en collaboration avec l'ADEME. Nous étudions des solutions opérationnelles pour utiliser des véhicules légers électriques en milieu urbain, mais pour l’instant leur autonomie est trop faible pour faire de la température dirigée. Et nous sommes bien sûr attentifs aux évolutions des véhicules à hydrogène. À l'avenir, lorsque les moteurs thermiques seront progressivement remplacés, nous devrons entreprendre une évolution plus structurelle de notre flotte, c’est pourquoi aucune option n’est laissée de côté. La solution sera certainement un mix entre les différentes énergies.

Quelles-sont vos prochaines échéances pour la transition vers des carburants plus écologiques ?

S.A. : Les évolutions récentes, notamment les hausses de prix du gaz, les problèmes d'approvisionnement en électricité durant l'hiver et les évolutions réglementaires, nous ont incités à prendre un peu plus de temps pour avancer sur ces nouvelles technologies.

Nous sommes bien résolus à atteindre nos objectifs en matière de décarbonation de la flotte, et nous restons flexibles pour adopter les meilleures solutions possibles en fonction des contraintes du marché et des performances des technologies émergentes.

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Adeline ADELSKI Adeline ADELSKI
Journaliste
Passionnée par les enjeux de mobilité durable, Adeline aime informer et inspirer les lecteurs sur les dernières tendances et innovations dans ce domaine.

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