OptiFuel testera début 2025 sa locomotive hybride biogaz/électrique

OptiFuel testera début 2025 sa locomotive hybride biogaz/électrique
A partir de janvier 2025, la société américaine OpiFuel expérimentera sa locomotive hybride Total-Zero et son tender optionnel motorisé. Une solution qui pourrait être développée à court terme pour supprimer la pollution du transport ferroviaire tout en diminuant les coûts d’exploitation et en augmentant l’autonomie.
 

La locomotive Total-Zero d’OptiFuel

Au départ, OptiFuel a imaginé pour sa locomotive une architecture modulaire permettant de choisir la motorisation principale : électrique à pile hydrogène (10 PAC Ballard de chacun 300 kW/408 ch), thermique hydrogène (10 moteurs Cummins X15H pour un total de 3 900 kW/5 300 ch), et thermique GNV (10 moteurs Cummins X15N pour un total de 3 750 kW/5 100 ch). Dans tous les cas, elle est hybride avec le même système électrique qui embarque une batterie LFP (lithium, phosphate de fer) de 760 kW de puissance.

Les deux solutions qui se basent sur des moteurs thermiques sont créditées d’une durée de vie de 30 ans, comme la structure de la locomotive et les unités de stockage du gaz (GNV ou hydrogène). Contre 10 à 20 ans pour les PAC H2. Grâce à une grande modularité de conception, l’entreprise américaine se réjouit de pouvoir employer 90 % d’éléments communs pour ses machines d’une puissance de 1 000 à 5 600 ch, qu’elles soient alimentées au gaz naturel ou à l’hydrogène.

Davantage de stockage sur le tender

Avec une motorisation GNV, la capacité de stockage sur la locomotive est équivalente à l’énergie de 1 980 galons (7 500 litres) de gazole. Cette architecture affiche une puissance totale combinée de 5 600 ch (4 120 kW) en exploitant le pack LFP et la technologie quick-power d’OptiFuel. La traction est réalisée au moyen de six moteurs électriques en courant alternatif fournis par CAF. Le rôle du tender optionnel est d’embarquer un maximum d’hydrogène ou de gaz naturel pour doter la locomotive d’une grande autonomie.

Dans son communiqué de presse, OptiFuel donne deux capacités différentes pour le stockage du GNV, exprimées en équivalents galons de gazole (EGG pour abréger) : 10 600 (environ 40 000 litres) et 7 500 (28 400 l). Nous partons du principe que c’est la seconde valeur, 7 500 EGG qui correspond à l’architecture expérimentée dans un an environ. Conforme au concept de départ, les 10 600 EGG seraient atteints dans la phase suivante. La motorisation du tender développe une puissance de 2 500 ch (1 840 kW). Il embarque également le même pack LFP de 760 kW.



Plusieurs années de test

OptiFuel assure que son système GNV/électrique présente, du puits à la roue, et en utilisant du gaz renouvelable, des émissions nulles concernant les particules et les oxydes d’azote, et négatives pour le CO2. C’est pour cela que le département de l’énergie américain va en partie financer les essais de pré-production qui vont se dérouler sur un an au centre de technologie des transports de l’administration fédérale ferroviaire.

A l’issue de cette phase, OptiFuel testera son matériel sur un million de miles (1,6 millions de kilomètres) aux Etats-Unis, avec dix locomotives et cinq tenders. Pour ces derniers, on reviendrait alors à une capacité de 10 600 EGG. La feuille de route de l’entreprise américaine prévoit une mise en production à horizon 2028. Un prix a déjà été avancé pour la locomotive : 5,5 millions de dollars (5 millions d’euros environ). Elle pourrait aussi être louée.
 

Pourquoi abandonner l’électrique et l’hydrogène ?

Il peut paraître étonnant que l’entreprise américaine s’oriente clairement aujourd’hui en faveur du bioGNV alors qu’elle a conçu et construit des modules de pile à combustible, de stockage d’hydrogène et de batterie pour les locomotives de manœuvre hybrides à hydrogène de la Sierra Northern Railway.

Le président d’OptiFuel, Scott Myers, explique : « Une locomotive de ligne de 4 500 ch nécessite une puissance élevée et continue pendant des heures prolongées. Ce que ni les solutions électriques à batterie ni celles hybrides à pile hydrogène ne seront en mesure de tenir ». S’y ajoutent selon lui la disponibilité du carburant, la facilité du stockage du gaz naturel, le moindre risque à l’usage, le coût d’exploitation global qui tient compte des tarifs estimés pour toutes les solutions sur les vingt prochaines années, et une autonomie qui serait allongée de 25 % par rapport au modèle diesel. « Nous pensons désormais que le gaz naturel renouvelable est la voie privilégiée pour des locomotives et des offres de transport à zéro émission », complète Scott Myers.
 

Projections

OptiFuel anticipe une baisse du prix des composants embarqués sur ses locomotives GNV grâce aux grands volumes qui pourraient être commandés. Ainsi si les États-Unis décidaient de choisir cette solution pour décarboner sur une période de 25 ans les 38 000 locomotives de fret du territoire.

L’enveloppe nécessaire pour ce programme s’élèverait à 150 milliards de dollars (138 milliards d’euros). Un investissement compensé par les importantes économies annuelles sur les coûts d’exploitation grâce à l’emploi d’un carburant moins cher, la diminution des coûts de maintenance, une plus grande fiabilité, et une automatisation accrue du système qui permettrait au rail d’augmenter sa part de marché dans le fret face au transport routier. Se proposant de gérer pendant la période transitoire à la fois le ravitaillement en gazole et l’avitaillement en gaz naturel, l’entreprise promet qu’il n’y aura aucune perturbation de service. Plus précisément, les locomotives des deux technologies cohabiteraient sur les lignes, sans avoir à modifier les itinéraires, la distance entre les arrêts, le temps pour effectuer les pleins en énergie, ni les budgets.
 

Modèle économique

Un modèle économique a déjà été imaginé. Afin de compenser les 8,5 milliards de dépenses à la charge des chemins de fer pour les infrastructures, OptiFuel fournirait gratuitement 3 000 tenders, 60 locomotives et leurs stations d’avitaillement.

En contrepartie, le contrat prévoit l’achat de bioGNV par les chemins de fer à un prix constant sur dix ans fixé aux environs de deux dollars l’EGG. Le volume et le prix du gaz naturel renouvelable seraient sécurisés par des engagements à long terme auprès de sites de production qui disposent de volumes stables et connus.

Cette offre serait officiellement présentée au ministère de l’Energie par GTI Energy. De son côté, OptiFuel endosse le rôle de responsable technique, en partenariat avec Cummins, BAE Systems, Luxfer Gas Cylindres, TMV Control Systems Inc., Ensco, CAF Group, New York Air Brake et Powerhouse, et la compagnie Marmon Rail. Ce sont principalement les fournisseurs des briques techniques qui constituent la locomotive et le tender.

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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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