Camions GNV : consommations et émissions réelles au coeur d'un nouveau rapport d'Equilibre

Camions GNV : consommations et émissions réelles au coeur d'un nouveau rapport d'Equilibre
Les porteurs du projet rhônalpin Equilibre ont pris l’habitude de rédiger et de diffuser en mai un rapport intermédiaire de leur expérimentation. En 2018, le document s’intéresse aux principaux facteurs qui influencent la consommation et les émissions polluantes des poids lourds alimentés au gazole ou au GNV.
 

2 années d’expérimentation

Les transporteurs qui participent au programme Equilibre, - Transports Magnin, Megevand, Prabel, Sotradel, G7, Jacky Perrenot, Transalliance -, ne s’appuient pas sur quelques données éparses pour établir leurs rapports. Après quasiment deux années de suivi, et 1 million de kilomètres audités, ils disposent désormais de 250 gigaoctets d’informations qu’ils peuvent analyser selon des paramètres précis, pour des résultats d’une rare finesse dans le domaine.Des relevés qui s'appuient sur l'expertise du CRMT qui a réalisé l'ensemble de l'instrumentation des véhicules. 

En complément du rapport de mi-parcours distribué en mai de l’année dernière, qui présentait des chiffres généraux sur les consommations et les émissions de CO2 et oxydes d’azote, celui qui vient de nous être transmis fait davantage dans le détail. Le document a été pensé pour mettre au jour l’influence réelle des principaux facteurs qui jouent sur l’impact environnemental des poids lourds en service. La précision des informations livrées a un objectif d’importance : guider les transporteurs dans leurs choix énergétiques en fonction de leurs usages.
 

Accélérations, dénivelés, charges transportées

Les 12 derniers mois ont permis d’isoler l’impact sur les consommations et émissions à l’échappement de 3 facteurs principaux : la fréquence des accélérations et la variabilité de la vitesse en fonction du type de voie empruntée (autoroute, route, rue) et des conditions de trafic ; le cumul des dénivelés positifs rencontrés sur les trajets ; le poids des charges embarquées dans les véhicules.
 
Si les déplacements de 15 poids lourds de 19 et 44 tonnes ont été disséqués, les analyses valablement récupérables portent sur 12 d’entre eux. Cette flotte se répartit en 3 porteurs 19 tonnes Iveco, Renault et Scania alimentés au GNV et 9 tracteurs 44 tonnes Daf, Iveco, Scania et Volvo fonctionnant pour certains avec ce même carburant gazeux, et pour d’autres au gazole.
 

Impact de l’infrastructure routière

Un premier exemple plus que parlant permet de rapidement comprendre comment des points de ralentissement fixes ou temporaires peuvent influencer les chiffres, - certains plus particulièrement que d’autres.
 
Ainsi au sein de cette observation menée avec un modèle diesel (PTC de 26 tonnes) sur une portion d’autoroute de 40 kilomètres barrée d’un péage et ralentie par une zone de travaux entraînant un changement de file.
 
Au niveau de la consommation en carburant, les chiffres ont pris 7% de plus avec l’arrêt au péage (de 27 à 29 litres, ramenés aux 100 kilomètres), et 15% (31 litres) au total si l’on tient compte aussi des travaux. Correct, et sans grande surprise.

 
En revanche, l’influence sur les émissions d’oxydes d’azote est bien plus importante en intégrant les mêmes obstacles, avec respectivement +20% (de 15 à 18 grammes, ramenés aux 100 km) et +150% (38 g/100 km). Ce sont 30 passages distincts qui ont été exploités pour parvenir à restituer de tels chiffres. Les auteurs du rapport en déduisent que : « Ce sont donc dans les phases transitoires (accélérations rapides) que l’essentiel des NOx sont émis, que ce soit avec un véhicule GNV ou Diesel. Dans ces phases, les moteurs émettent naturellement plus de NOx et les systèmes de dépollution se montrent moins efficaces qu’en régime stabilisé ».
 
En d’autres termes, le nombre de relances du véhicule sur un trajet a un impact très loin d’être négligeable sur sa consommation et ses émissions d’oxydes d’azote. On mesure ici, au-delà de la nature du carburant, toute l’importance de l’éco-conduite et le rôle négatif de certains aménagements comme les ralentisseurs, ou les feux tricolores et panneaux Stop à la place des giratoires, eux-mêmes en cause.
 

Impact du trafic

L’étude de l’impact du trafic est doublement intéressante, car elle permet, non seulement de valider le poids des redémarrages (parfois plus de 200 fois sur 100 kilomètres) dans la circulation urbaine sur la consommation et les émissions de dioxyde de carbone, mais aussi de mettre au jour que l’utilisation du GNV se montre bien plus vertueuse dans ce décor de plus en plus soumis aux restrictions de circulation.
 
Ainsi, quand les poids lourds alimentés au gazole émettent 8 fois plus de NOx en situation de fort trafic par rapport à un écoulement fluide, les chiffres ne sont multipliés que par 2 avec une motorisation au GNV. Et pourtant : sur un parcours fluide, les émissions d’oxydes d’azote sont au même niveau pour les véhicules gavés au gazole et ceux au gaz ; la surconsommation de 10% lors des forts trafics est commune aux 2 carburants.
 
Ces résultats ont été obtenus en confrontant les données acquises sur 18.000 kilomètres parcourus sur les boulevards périphériques de Lyon (69) et d’Annecy (74). Indépendamment de la préférence clairement à apporter aux camions fonctionnant au GNV, les résultats de l’étude militent pour une exploitation du transport lourd lorsque la circulation est fluide.

Impact du vent

Pour évaluer l’impact du vent, les acteurs du programme Equilibre ont analysé les données recueillies en effectuant, avec le même tracteur 44 tonnes, 259 fois un trajet, - dans un sens ou dans l’autre -, sur un tronçon autoroutier entre Orange (84) et Valence (26). Pourquoi ce choix de site ? Tout simplement parce qu’il « présente la caractéristique d’être régulièrement exposé au vent dans un axe Nord-Sud, c’est-à-dire dans l’axe moyen de la route », expliquent les analystes.

Là encore, deux observations importantes. Tout d’abord que la consommation peut baisser jusqu’à 12%, dans les conditions de l’expérience, avec un vent arrière, et augmenter de 20% avec des rafales de face. En revanche, les émissions d’oxydes d’azote n’ont quasiment pas varié sous l’influence du vent. Les auteurs de l’étude expliquent ce phénomène par « un fonctionnement optimal du système de post-traitement dans ces conditions de roulages à vitesse quasi stabilisée ».
 

Des leviers à actionner

A la suite de l’étude des principaux facteurs qui influencent la consommation et les émissions polluantes des poids lourds, les analystes ont pu dégager des leviers à actionner pour modérer l’impact environnemental du fret routier.
 
Au-delà de la migration des flottes du gazole au GNV : « planification des trajets et choix des parcours en fonction de la qualité des infrastructures ; prise en compte du trafic et de la météo ; aérodynamique du véhicule ; nombre d’arrêts ou de manœuvres ».
 

Des systèmes de dépollution perfectibles et défaillants

L’expérimentation a mis en évidence sur plusieurs des poids lourds des défaillances sur les systèmes de dépollution. L’équipe d’Equilibre a été alertée par des résultats anormalement élevés au niveau des émissions d’oxydes d’azote dans certaines circonstances d’utilisation. Contactés, les constructeurs se sont chaque fois engagés à fournir un correctif ou à remplacer le dispositif en cause. Lorsque cela a été fait, les mesures ensuite relevées ont été conformes à celles des autres véhicules similaires.
 
Ces observations révèlent que même les transporteurs les plus scrupuleux sur l’impact environnemental de leur activité peuvent être confrontés, sans le détecter, à ce problème.
 

Gazole/GNV : CO2

L’étude publiée il y a quelques jours avait également pour objectif de compléter les évaluations présentées dans le rapport de mi-parcours l’année dernière. C’est sur les tracteurs 44 tonnes qu’une comparaison a pu être poursuivie entre les modèles alimentés au gazole, et ceux utilisant du GNV.
 
Globalement, les émissions de CO2, - du réservoir à la roue -, sont assez similaires entre le produit pétrolier et le gaz naturel. Les chiffres ont même donné légèrement l’avantage au gazole lors des trajets sur autoroute avec 71 grammes de CO2 pour 100 kilomètres, contre 76 pour le GNV. C’est sur les routes nationales que le rapport avantage clairement le gaz naturel : 80 contre 113 g/100 km.
 
Le document ne dit rien à ce sujet, mais concernant le dioxyde de carbone, l’impact serait très clairement en faveur du GNV du puits à la roue, d’autant plus que les réservoirs seraient remplis de biogaz. Une précision qui a son importance puisqu’il s’agit aussi d’aider les transporteurs à choisir leurs prochains poids lourds en fonction de l’impact environnemental global de leur activité.

Gazole/GNV : NOx

Du côté des oxydes d’azote, en revanche, - et encore une fois du réservoir à la roue -, le gaz naturel est toujours désigné comme le carburant le plus vertueux. Et ce : que les chiffres soient exprimés en grammes pour 100 kilomètres parcourus ou en milligrammes par kilowattheure d’énergie.
 
Ainsi, en g/100 km : 17 pour le GNV contre 39 sur autoroute, 40/98 sur route nationale, 15/37 sur voie rapide urbaine, 48/133 pour une traversée d’agglomération, et 106/175 quand le camion est ralenti dans une zone urbaine dense. Là encore la différence serait bien plus flagrante et avantageuse pour le biogaz, en comptabilisant du puits à la roue.

 

Promesse tenue pour le GNV

Avec ce nouveau rapport, les porteurs du projet Equilibre souhaitent que soit retenu un point qu’ils jugent essentiel, mettant en avant la mobilité GNV des poids lourds : « La promesse des fournisseurs aux transporteurs est fiable et véridique ». Pour faire face aux défis auxquels est confronté le fret routier, les analystes assurent que les transporteurs et constructeurs ont un intérêt partagé à ce que les résultats vertueux constatés sur les motorisations au gaz naturel soient amplifiés en jouant sur 2 tableaux.
 
Pour un gain de consommation très significatif, le rendement énergétique des blocs alimentés au GNV devra être amélioré. Il n’est que de 37-38%, quand il monte à 43-44% avec la technologie au gazole. Afin « de répondre aux attentes de la collectivité et aux orientations à venir des politiques publiques », les rapporteurs espèrent que « les motorisations GNV vont évoluer vers un niveau d’émissions de polluants ultra faible (projet ‘Ultra Low NOx’) ».

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