Rapport Sea-LNG : Tous les signaux sont au vert pour le GNL marin

Rapport Sea-LNG : Tous les signaux sont au vert pour le GNL marin
Coalition industrielle multisectorielle créée pour démontrer les avantages du GNL en tant que carburant marin viable, Sea-LNG vient de publier un rapport encourageant. Avec un niveau de commandes élevé pour de gros bateaux compatibles, les prix exceptionnellement hauts du gaz naturel n’ont pas découragé les acteurs de la navigation hauturière.
 

Un haut niveau de commandes

Sea-LNG se réjouit de pouvoir glisser en introduction de son rapport de 28 pages intitulé « LNG - Delivering Decarbonisation » que « 2022 a été une autre année très forte pour les commandes de navires alimentés au GNL ».
 
A l’échelle mondiale, le volume est quasiment similaire à celui enregistré en 2021, l’année record actuellement à ce sujet. Et pourtant les tarifs du GNL ont connu des valeurs exceptionnellement élevées.
 
Si les armateurs ne se découragent pas, c’est parce qu’ils savent pouvoir compter sur des infrastructures dédiées dans les principaux sites de soutage, avec une extension rapide à ceux qui n’en sont pas encore équipés. Ainsi, entre janvier et décembre 2022, le nombre de ports concernés est passé de 141 à 185. Une cinquantaine d’autres localisations devraient s’ajouter à la liste d'ici à 2025.

 

Navires de soutage

Selon Sea-LNG, il y avait en outre à la fin de l’année dernière 40 navires de soutage de GNL, c’est-à-dire équipés pour fournir ce produit à d’autres bateaux. Ils ont opéré dans le nord de l’Europe, la Méditerranée, les Etats-Unis, le Canada, la Corée du Sud, le Japon, la Malaisie, Singapour, le Brésil et l’Australie. Mais aussi, de façon inaugurale, en Chine, dans les Caraïbes et en Russie.
 
Avec une capacité élevée de 18 300 m3, le premier navire français de soutage a été mis en service l’année dernière avec Gas Vitality de TotalEnergies, au départ de Marseille-Fos. Pour comparaison, les 2 plus petits de ces navires, propriété de Polaris New Energy LLC, étaient limités chacun à 5 500 m3 de GNL à délivrer. A l’opposé, le plus important affiche une valeur de 20 000 m3, au service de Avenir LNG.
 
On retrouve cette année TotalEnergies qui compte lancer dès ce premier trimestre, à Singapour, le Brassavola (12 000 m3). Autre pétrolier cité par Sea-LNG : Shell, pour un navire de soutage de 5 000 m3 qui devrait fonctionner dans le port de Barcelone. Vingt nouveaux exemplaires de ces bateaux de soutage sont actuellement en commande.

 

Répartition par types de navires

En se basant sur le total des tonnages des navires, on note 20 % de bicarburation avec le gaz naturel liquéfié, et une répartition inégale selon les types de navires. Les chiffres grimpent par exemple à 93 % pour ceux spécialisés dans le transport de voitures. Logique : pour abaisser l’empreinte carbone des véhicules terrestres neufs, en particulier les électriques fabriqués par exemple en Chine et acheminés en Europe ! Recourir au GNL pour ces cargos tient de la haute stratégie pour continuer à rendre très désirables les modèles expédiés par MG, Nio, Aiways, Seres, LeapMotor, et d’autres encore. Il n’y a pas d’autre alternative à court terme. En nombre, 10 cargos transporteurs de voitures sont opérationnels actuellement, mais 119 sont commandés.
 
Les chiffres sont encore plus élevés du côté des porte-conteneurs : 43 en service, et 175 à venir. Suivent les navires-citernes, avec déjà 100 exemplaires exploitables, et 92 en attente. On compte aussi 18 vraquiers GNL, et 50 commandés. Le courant emporte tout autant les rouliers (Roro et Ropax) : 32 + 16. Ainsi que les bateaux de croisière (13 + 26). A noter que tous ces bâtiments bénéficient en général d’une durée de vie comprise entre 25 et 30 ans. Ce qui signifie que tous les nouveaux navires commandés s’inscrivent dans un mouvement sur le long terme.

Jusqu’à 4 000 navires GNL en 2030

Le seuil des 100 navires opérationnels acceptant le GNL comme carburant a été franchi en 2017. En fin d’année dernière, nous étions déjà à plus de 350 bâtiments. En comptant ceux en cours de commande, les 500 unités seraient dépassées en 2023, et l’on friserait les 900 à la fin de la décennie. Toutefois, Sea-LNG voit beaucoup plus grand : entre 2 000 et 4 000 navires à cette échéance en intégrant les nouveaux ordres de construction qui devraient être signés en suivant la tendance actuelle.
 
Pour l’organisme, ce phénomène installé montre que les propriétaires de bateaux hauturiers sont persuadés que le GNL offre déjà aujourd’hui des avantages immédiats en termes de qualité de l’air local, répond aux impératifs de décarbonation, et présente une solution peu risquée à adopter plus ou moins progressivement.
 
La progressivité, justement, permet d’envisager des mélanges entre le gaz naturel d’origine fossile, celui issu d’opérations de transformation de la biomasse, et le e-GNL synthétique produit avec une électricité d’origine renouvelable par électrolyse. Ce dernier est ainsi fortement lié à la production d’hydrogène vert.
 

Décarbonation progressive

Sea-LNG réfute l’idée d’une décarbonation subite des navires hauturiers. Elle impliquerait la mise en place d’infrastructures de ravitaillement qui n’existent pas encore, d’autant plus en partant sur d’autres solutions que le gaz naturel. Par rapport au fioul marin peu soufré (VLSFO), le GNL d’origine fossile offre déjà un gain de 23 % sur les gaz à effet de serre en tenant compte du cycle de vie complet.
 
D’ici 2050, les progrès réalisés pour décarboner des produits alternatifs comme le méthanol, l’ammoniac et l’hydrogène liquide s’effectueront par palier, conservant toute son efficacité à la solution GNL. A terme, sur la durée de vie d’un bateau, elle offrira une réduction de plus de 50 % des GES à comparer avec le VLSFO. Avec des prix parfois très supérieurs, le méthanol et l’ammoniac feraient moins bien, avec un gain respectif de seulement 37 et 28 %. Ces produits n’existent pas aujourd’hui en production verte exploitable comme carburants marins.

Par ailleurs, le GNL coche toutes les cases en matière de densité énergétique élevée, fiabilité, sécurité, infrastructures d’approvisionnement, et de disponibilité. Ce qui le distingue encore positivement.

Quelles perspectives ?

Le système de calcul du règlement CII accorde la possibilité de faire fonctionner les bateaux au GNL d’origine fossile jusqu’en 2030, avec une extension jusqu’en 2050 sous forme d’un mélange croissant incorporant du bioGNL ou du e-GNL.
 
En 2024 devraient entrer en vigueur dans le transport maritime les pénalités issues du système européen d’échange des quotas (EU ETS). Sea-LNG a calculé une exposition fiscale de l’ordre de 37 000 euros par jour en employant du VLSFO (250 euros de taxe par tonne). Les chiffres tombent à 27 000 euros avec le GNL (220 euros/tonne), et bien en dessous en employant aussi du bioGNL. Dans les 2 prochaines années à venir, 78 usines de production devraient être opérationnelles rien qu’en Europe, augmentant la part déjà disponible pour le transport maritime. Ce qui devrait permettre d’en multiplier par 10 les volumes.
 
Ces perspectives ne laissent que peu de doutes sur la possibilité de la filière à fournir progressivement les quantités nécessaires à la pérennité de la marine hauturière. Dans un mélange à 20 % avec du GNL fossile, 16 et 63 % de la demande totale en énergie pour ce secteur pourraient être couverts respectivement en 2030 et 2050. A cette dernière échéance, le coût moyen du bioGNL livré devrait baisser d’environ 30 % par rapport à aujourd’hui. Sea-LNG note toutefois que ces unités sont le plus souvent éloignées des ports de soutage.
 
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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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