Le biogaz avance en Bretagne et dans les Pays de la Loire

Le biogaz avance en Bretagne et dans les Pays de la Loire
Plus de 200 personnes étaient réunis à AgriCampus Laval (53) vendredi 19 novembre dernier afin de participer à la journée professionnelle du biogaz.

Le programme validé par GRDF, GRTgaz, Aile (Association d’initiatives locales pour l’énergie et l’environnement) et le cluster Méthatlantique comptait en particulier 3 parties très attendues. Il s’agissait tout d’abord de la visite de l’unité de méthanisation de Méthamaine. Située en Mayenne à Meslay-du-Maine, elle a pour originalité de produire du biogaz à partir du fumier pailleux fourni par les éleveurs et centres équestres environnant. Ce n’est pas un hasard. Le projet a été lancé en 2013 par Benoît Dutertre, négociant local en chevaux de course. Souhaitant valoriser les déchets liés à son activité, il a réussi à embarquer avec lui une dizaine d’éleveurs. Bénéficiant en particulier du soutien de la communauté de communes du Pays de Meslay-Grez, et de partenaires institutionnels et privés comme l’Ademe et GRDF, l’unité de méthanisation de Méthamaine a été mise en service le 11 février 2020.

21 000 tonnes de déchets organiques valorisés par an

Une vue aérienne de l’unité de méthanisation de Méthamaine fait clairement apparaître les 2 grands dômes qui abritent respectivement le digesteur de 3 800 m3 et le post-digesteur de 2 500 m3. 

Après filtration membranaire, le biogaz est injecté dans le réseau public de gaz naturel. La première année, cette installation a reçu en entrée quelque 21 000 tonnes de matière organique. Ce volume n’est pas uniquement composé de déchets provenant d’activités équestres. Il compte également des lisiers d’élevages bovins et porcins, du fumier de lapins, du maïs d’ensilage et d’autres céréales, des cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE), etc. Le biogaz ainsi obtenu est de nature à alimenter approximativement 1 700 logements. Les 19 000 tonnes de digestat coproduit, essentiellement liquide, servent à l’épandage. Au bout d’un investissement de 5,1 millions d’euros, le site dégage des recettes annuelles supérieures au million d’euros pour le biogaz injecté.

Intervention du climatologue Jean Jouzel

Autre temps fort de la journée professionnelle du biogaz du 19 novembre 2021, l’intervention de l’éminent climatologue Jean Jouzel. Invité en tant que grand témoin, il s’est exprimé sur le thème « Urgences climatiques et transitions énergétiques ». Il est revenu sur le texte commun adopté après deux semaines de négociation par les Etats réunis dans le cadre de la COP26, aux résultats si décevants.

S’adaptant au décor de cette journée, il a pris le temps d’évoquer lors de son intervention les enjeux environnementaux en milieu rural. Et notamment la place des agriculteurs comme vecteurs de solutions pour la transition écologique, notamment avec la production de gaz vert. « Ces énergies renouvelables sont une chance pour les territoires. Elles favorisent l’économie locale et sont vertueuses pour l’environnement », a-t-il en particulier souligné.

En chiffres

Pour les 200 professionnels réunis il y a quelques jours en Mayenne, il s’agissait aussi et surtout d’effectuer un point sur la méthanisation, et notamment en établissant un focus sur les territoires bretons et ligériens. Que d’évolutions depuis 1976 et la première installation de valorisation de biogaz en Bretagne. Le passage aux années 2010 a marqué une période d’essor de la méthanisation, qui est aujourd’hui très majoritairement agricole.

La possibilité d’injecter le biogaz dans le réseau dès 2013 a décidé de plus en plus d’acteurs à entrer dans la filière. Au premier septembre dernier, les 2 régions accueillaient 287 unités de valorisation du biogaz en fonctionnement, dont 67 (45 en Bretagne + 22 en PDLL) qui injectent leurs productions dans les réseaux gaziers. Des chiffres qui vont rapidement être dépassés, puisque, actuellement, on compte plus de 250 projets de méthanisation, avec une forte dominance de l’injection après valorisation des déchets agricoles. Dans 5 ans, l’objectif national de 10 % de gaz vert dans les réseaux de transport, formulé par la programmation pluriannuelle de l’énergie, devrait être atteint dans les Pays de la Loire et en Bretagne.

3,8 millions de tonnes

Plus de 500 exploitations agricoles sont actionnaires d’unités de méthanisation à la ferme ou collective. « Le tonnage total d’intrants valorisés pour les unités de méthanisation à caractère agricole en fonctionnement atteindrait 3,8 millions de tonnes en Bretagne et en Pays de la Loire », expliquent les organisateurs de la journée professionnelle du biogaz. Ce volume serait composé à 65 % d’effluents d’élevage, tels les fumiers, lisiers, et fientes.

Après méthanisation, il ressort des sites environ 3,4 millions de tonnes de digestat à épandre pour fertiliser les cultures et/ou amender les sols. Soit quasiment 90 % du poids des intrants pour cet engrais organique naturel qui peut se substituer aux produits minéraux d’origine fossile. Les unités de méthanisation des Pays de la Loire et de la Bretagne produisent annuellement 432 et 517 GWh de gaz vert. De quoi alimenter respectivement 72 000 et 86 000 logements neufs ainsi chauffés.

Des partenaires engagés

GRDF

GRDF s’active quotidiennement à favoriser l’injection du biogaz dans le réseau et pour fédérer l’ensemble des acteurs impliqués. 

« En tant que gestionnaire du réseau de distribution, GRDF accompagne les porteurs de projets, raccorde les sites de méthanisation et assure l’exploitation et la maintenance des postes d’injection de biométhane », détaille l’entreprise. Les établissements de ce type qui injectent tout ou partie de leur production sont à 80 % raccordés au réseau exploité par GRDF. Ce dernier multiplie les occasions de faciliter l’ouverture de nouvelles unités. 

Ainsi en co-animant avec l’Ademe le groupe de travail dédié à l’injection, en gérant le registre des garanties d’origine qui assure la traçabilité du biométhane, et en collaborant avec les diverses parties prenantes (R&D, acteurs du secteur agricole, milieu associatif, etc.).

Aile

Créée en 1995 par l’Ademe et les coopératives d’utilisation de matériels agricoles (Cuma) de l’Ouest, l’Aile est une agence locale de l’énergie spécialisée dans la valorisation de la biomasse en milieu agricole et rural. 

Dans les Pays de la Loire et en Bretagne, mais aussi à l’échelle nationale, elle est devenue en 15 ans d’animation du plan biogaz un acteur du développement de la méthanisation. Elle propose aux porteurs de nouveaux projets d’unité de méthanisation agricole une banque d’informations et d’outils pratiques accessibles sur le Web, un accompagnement dans leur réflexion, son expertise pour réaliser le dossier d’ingénierie qui servira entre autres à obtenir des subventions, un suivi du programme jusqu’au démarrage, des mises en relation avec des exploitants dans le cadre de retours d’expérience, et une formation à la pratique.

GRTgaz

Deuxième transporteur européen de gaz, GRTgaz a noué différents partenariats qui visent à soutenir le développement de projets de méthanisation. Ainsi, par exemple, avec les chambres régionales d’agriculture, l’association des agriculteurs méthaniseurs bretons, et le Cluster Methatlantique. 

L’entreprise participe à des collectifs tels que Bretagne Eco-Entreprises, Coop Métha 44, CAP Métha 49 et le consortium Enra 53. Avec GRDF, GRTgaz s’active à favoriser l’injection, avec déjà 45 zonages de raccordement dans les 2 régions. Le tout pèse 102 millions d’euros d’investissements, pour une capacité d’accueil de 5,7 TWh de biométhane à terme. Cette valeur est adaptée à la dynamique des territoires concernés. Entrevoyant la neutralité carbone pour 2050 en Bretagne et dans les Pays de la Loire, GRTgaz considère que « les gaz renouvelables, et en particulier la méthanisation, doivent jouer un rôle majeur dans la décarbonation de la France ».

Le cluster Méthatlantique

Etabli en association régionale loi 1901, le cluster Méthatlantique représente 42 entreprises industrielles et de services qui s’activent à développer le méthane renouvelable, de la production aux usages. Il anime le Club BioGNV Pays de la Loire, une instance qui a pour mission de promouvoir la mobilité au biogaz sur le territoire. 

Soutenu financièrement dans ses actions par le conseil régional, l’Ademe et la CCI, il compte parmi ses offres de service des groupes de travail thématiques, l’organisation de webinaires et autres événements assimilés, des stands collectifs pour se faire connaître dans des salons professionnels, du lobbying local, régional et national. En se rapprochant du cluster Méthatlantique, les porteurs de nouveaux projets de méthanisation bénéficieront de veilles techniques, réglementaires et politiques, et de la possibilité d’ancrer leurs programmes dans une démarche collective.

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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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