A Angers, les Alchimistes roulent au bioGNV

A Angers, les Alchimistes roulent au bioGNV
Dans 13 villes en France, les Alchimistes collectent les biodéchets. Au bout d’un processus de décomposition qui dure plusieurs semaines, le compost est mis en vente à destination des maraichers locaux et dans des enseignes fréquentées par les particuliers. Fruit d’une amitié de 15 ans, l’antenne d’Angers (49) n’a que quelques mois d’existence. Adrien et Benoît ont décidé de rouler au bioGNV avec un Fiat Ducato et une Skoda Octavia G-Tec.
 
Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Toulon, Montpellier, Lille, La Réunion, et maintenant Angers : Voici quelques villes et une île où le réseau des Alchimistes est déjà actif.
 
« Le mouvement existe depuis environ 6 ans. Il a commencé à Paris où il fonctionne très bien », résume Benoît Delanoue. Lui, c’est le directeur général de l’antenne d’Angers pour les Alchimistes. Animé par une furieuse envie d’accélérer la transition environnementale, et pas pour de rire, il a une bonne connaissance du gaz naturel pour la mobilité. A 35 ans, l’ingénieur s’est déjà investi dans plusieurs vies professionnelles, dont l’une l’a amené à travailler sur le dimensionnement de stations d’avitaillement en hydrogène et en GNC.
 
Aujourd’hui, c’est lui qui collecte les déchets alimentaires dans la ville et aux alentours. Son outil pour cela : Un Fiat Ducato qui fonctionne au GNV, avec, à l’arrière, des bacs de 120 litres retenus par une solide sangle. Le fourgon appartenait auparavant à une collectivité du secteur de Grenoble, et n’affichait que 30 000 km quand Adrien est allé le chercher à 700 km du Maine-et-Loire.
 

Une même vision autour de l’élimination des biodéchets

Adrien, c’est Adrien Lanté, l’autre co-fondateur des Alchimistes d’Angers, 35 ans également. Président pour l’antenne, il assure le rôle de directeur pour la gestion de l’entreprise : « Elle répond à ce qu’on appelait auparavant les entreprises ESS dans la mouvance de l’économie sociale et solidaire. C’est une SAS avec, comme c’est indiqué dans les statuts, l’insertion de personnes en rupture avec l’emploi, dont celles en situation de handicap, et la volonté de répartir la valeur créée ».
 
Démarrée en septembre 2022, la petite structure ne compte aujourd’hui que Benoît et Adrien. « Dans 2 ans environ, nous aurons embauché une quinzaine de personnes », prévoit ce dernier.
 
Pour ses déplacements professionnels, il utilise sa propre voiture, une Skoda Octavia G-Tec. Ensemble, les 2 amis depuis 15 ans se sont mobilisés en constatant « la problématique des biodéchets que l’on incinère alors que les agriculteurs locaux ont besoin d’amendements pour leurs terres ».

 

Loin du high-tech

Sa sensibilité pousse Benoît à avoir une certaine vision bien particulière de l’entrepreneuriat : « C’est la liberté d’agir, de le faire sur le territoire, en répondant à l’urgence environnementale, avec un moteur social très fort ». Pour lui, « la transition écologique doit se faire rapidement ». Et pas forcément avec des technologies à la pointe : « On se creuse bien la tête avec le high-tech. Mais avec du basique, de l’ordinaire, on peut aussi faire de grandes choses et rapidement. Notre activité repose sur un processus naturel ».
 
Chaque semaine, le Ducato GNV prend en charge de l’ordre de 4 tonnes de déchets alimentaires : « Nous passons une fois par semaine pour ne pas laisser s’abîmer la matière sur place ». Le portefeuille des clients fournisseurs se diversifie rapidement pour les Alchimistes du 49. « Nous collectons les déchets alimentaires auprès des collectivités et des entreprises. Parmi nos fournisseurs, nous comptons des restaurants, des cantines scolaires, des Ehpad, une maison d’arrêt, des selfs, des entreprises de l’agroalimentaire. Nous récupérons ainsi le marc de fruit du fabricant de liqueur Giffard. Nous travaillons aussi avec Cointreau », liste Adrien.
 

Dynamique écoresponsable

Dans le Maine-et-Loire, les Alchimistes entretiennent aussi des relations avec des restaurants gastronomiques : « Ainsi l’un de nos premiers clients, Le Bosquet, aux Ponts-de-Cé, qui cuisine beaucoup les fruits de mer. Les restaurateurs ont davantage de facilité à recruter quand ils adoptent une dynamique écoresponsable, conformément à la réglementation. Les clients y sont de plus en plus sensibles aussi ». Les traiteurs sont logés à la même enseigne : « Ils doivent faire face à des appels d’offres toujours plus nombreux à formuler des exigences en matière d’écoresponsabilité ».
 
Les collectivités vont également devoir s’y mettre : « Au 1er janvier 2024, elles devront mettre en place des solutions de collecte auprès des citoyens. Actuellement, les poubelles noires comptent environ 30 % de biodéchets. Comme les habitants ne voudront pas se déplacer à plus de 150 m de chez eux pour cela, les grandes villes vont devoir installer plusieurs dizaines de bac sur leur territoire, comme c’est déjà le cas à Paris ou à Lyon, par exemple ».
 

Compostage

La plateforme de compostage des Alchimistes d’Angers est localisée à Ecouflant. « Nous commençons par effectuer une pesée afin d’adresser à nos clients un reporting des déchets alimentaires qu’ils produisent. Les bacs sont retournés sur un tapis roulant pour les débarrasser des intrus. Il n’est pas rare d’y trouver du plastique, des verres et des couverts. La matière doit vraiment être bien triée. Elle est ensuite mélangée à 50/50 avec des déchets verts comme du broyat de bois fourni par des paysagistes locaux », explique Benoît.
 
« Le tout est placé dans une baie de maturation, et retourné toutes les 2 semaines. Répondant à la norme NFU 44-51 sur les amendements organiques, notre compost est prêt en 15 semaines. Il est compatible avec le maraîchage biologique où il est utilisé localement », poursuivent les 2 associés. De concert, ils ont envie que se créent « des boucles locales d’économie circulaire, sans trop transporter la matière ». Et ça marche déjà : « Des restaurateurs veulent connaître les maraîchers qui utilisent le compost obtenu avec leurs déchets, pour, en retour, acheter leurs produits ».
 

Autres exploitations

« Le compost des Alchimistes sert aussi à la renaturation des villes. C’est devenu une obligation d’avoir des espaces verts dans les collèges et lycées. Quand on arrache le macadam, la terre est inerte dessous. Il faut la réactiver. Notre compost est idéal pour cela, car riche en champignons », expose Adrien. A côté de lui, Benoît tient dans les mains un sachet de 1 litre aux couleurs des Alchimistes des Pays de la Loire et indiquant « Le coup de pousse 100 % naturel pour vos plantes » : « Il est vendu dans les Biocoop des environs. Nous avons un conditionnement en 20 litres que l’on trouve dans les jardineries. Nous assurons aussi des livraisons directes pour les potagers », complète Benoît.
 
Le chiffre d’affaires de l’antenne d’Angers est alimenté à 80 % par la collecte des biodéchets, 15 % par la vente du compost, et 5 % par des opérations de sensibilisation payées par les entreprises et collectivités : « Nous formons les personnels, par exemple dans les restaurants. Chez Cointreau, nous avons sensibilisé au gaspillage alimentaire les collaborateurs lors de leur pause déjeuner sur le site. Nous accueillons aussi des écoles sur notre lieu de compostage ».

A Angers, Adrien et Benoît ont fait le choix de rouler au bioGNV pour collecter les biodéchets

Réseau collaboratif franchisé

Les antennes locales des Alchimistes fonctionnent sur le mode de la franchise, mais avec un véritable esprit de partage.
 
« Chaque antenne est autonome. Nous ne sommes pas tenus par la main par des personnes à la tête du réseau. En revanche, il règne un véritable esprit collaboratif. Via l'application Slack, nous bénéficions de la remontée d’expérimentations menées dans les territoires », apprécient les 2 associés.
 
Le réseau devrait compter une trentaine d’antennes à horizon 2026. Celle du Maine-et-Loire pourrait bien inclure Cholet et Saumur dans ses tournées : « D’un coté il y a une volonté d’impact en nous étendant, et de l’autre la recherche de l’efficacité dans nos déplacements ».
 

Le GNV chez les Alchimistes

Rouler au GNV n’est pas une obligation chez les Alchimistes au niveau national : « Ceux qui le font déjà, c’est parce qu’ils doivent intervenir dans des zones à faibles émissions. Ce n’est pas notre cas pour le moment. A Angers, nous avons fait le choix du bioGNV par conviction. C’est un carburant qui coche toutes les cases pour nous. Nous sommes très contents de pouvoir dire aux clients que nous roulons propre ».
 
La consommation devrait même augmenter dans les années à venir : « Avec un plein, sans tenir compte des 9 litres d’essence, le Ducato peut parcourir 350 km. Une tournée de 100 km nous prend environ 2 heures. Nous pensons passer à 2 tournées quotidiennes, et à nous équiper d’un deuxième fourgon GNV. Chacun d’eux parcourrait environ 1 000 à 1 500 km par semaine ».
 
Et pour l’avitaillement ? « Nous utilisons la borne du SIEML réservée aux professionnels. Le syndicat départemental de l’énergie nous a proposé une offre intéressante. En matière de mobilité durable, les coûts comprenant le prix d’achat des véhicules et les factures d’énergie doivent être concurrentiels face au diesel ».
 
Gaz Mobilité et moi-même remercions vivement Benoît Delanoue et Adrien Lanté pour leur disponibilité et leur témoignage très intéressant. Un grand merci également à Sébastien Maillard et Baptiste Orinel de GRDF pour nous avoir facilité la mise en relation et proposé que la rencontre se déroule dans les locaux de l’entreprise à Avrillé.
 
 

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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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1 Commentaire

  1. AlberiPublié le 06/03/2023 à 11:58

    Merci pour cet article intéressant dans le cadre d’une économie circulaire.
    Les biodéchets ne devraient avoir que 2 issues : soit le compostage, soit la méthanisation.
    Comment font les Alchimistes pour limiter la production de méthane lors du compostage ?

    On constate également encore une borne d’avitaillement GNV réservée aux professionnels ! Quand les collectivités comprendront que l’intérêt public est d’avoir des stations publiques. D’ailleurs de l’argent public n’est-il pas mis dans le financement de ces stations ? Merci au SIEML de penser à élargir l’accès de votre station aux particuliers...

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