Etude Sia Partners : le GNL comme solution pour une mobilité plus vertueuse

Etude Sia Partners : le GNL comme solution pour une mobilité plus vertueuse
L’étude diffusée par la société de conseil Sia Partners au début du mois a pour objectif de mettre en avant le gaz naturel liquéfié comme solution de substitution aux carburants pétroliers lourds face au durcissement des réglementations environnementales dans le secteur du transport.

Véhicules lourds

Qui douterait encore aujourd’hui que le gaz naturel n’a pas une place majeure, et même prépondérante à jouer dans la mobilité de demain, en particulier pour les déplacements à longues distances des engins les plus lourds, des camions et bus, jusqu’aux paquebots ?

S’il en était encore, Sia Partners rappelle les bénéfices du GNL sur l’environnement, dont, sans aller jusqu’aux sources d’approvisionnement les plus vertueuses, une réduction de 16% des émissions de CO2 (réduction de 97% du puits à la roue avec du biométhane comme source), et jusqu’à 90% de polluants évités, en prenant comme base un camion Iveco Stralis diesel de norme Euro 5. Le tout, pour un coût global d’exploitation moindre.

Maturité technologique

Comme nombre d’observateurs, mais aussi d’acteurs qui portent la filière du gaz naturel, en sont persuadés, le GNL « présente aujourd’hui un niveau de maturité technologique suffisant pour étendre son usage aux véhicules lourds (camions, bus, navires, etc.), justifiant ainsi son déploiement à grande échelle ».

C’est une bonne nouvelle à l’heure où différentes autorités nationales et internationales durcissent aux quatre coins du monde les réglementations environnementales applicables aux transports des personnes et des marchandises. D’autant plus que d’importantes réserves de gaz naturel sont disponibles, met en avant Sia Partners, en Europe, en Asie et aux Etats-Unis.

Focus

Dans son étude, Sia Partners a décidé d’effectuer 2 focus en particulier, le premier au sujet du transport routier, et le second sur le transport maritime. La société de conseil estime que ces 2 filières disposent d’une maturité suffisante pour un développement efficace et rapide. En revanche, elle a écarté le transport par avion, le rail, et la navigation fluviale. Pour l’aviation et le rail, le cabinet justifie sa position par le fait que le GNL n’y est encore qu’au stade de l’expérimentation, sans industrialisation prévue à ce jour, avec cependant une relative avance pour les trains. Le transport fluvial est plus évolué, selon Sia Partners, mais avec des développements encore trop localisés à ce jour.

Emissions

Par ailleurs, c’est dans les transports routiers et maritimes que sont émis les plus importants volumes de polluants chimique, CO2 et particules du secteur des transports. Selon les chiffres 2015 à disposition de l’agence, ils sont respectivement responsables des rejets suivants : 75 et 11% des gaz à effet de serre, 43 et 40% de l’oxyde de souffre, 5 et 92% des oxydes d’azote, 34 et 38% des particules. En outre, interrogeant les données 2013, leur consommation en énergie représente environ 1.939 et 270 millions de tonnes équivalent pétrole, contre 300, 65 et 160 Mtep pour l’aviation, le rail, et le transport fluvial.

Prix

Pour promouvoir l’emploi du gaz naturel liquéfié, Sia Partners a comparé son prix en dollars, pour un équivalent de baril de pétrole, avec le fuel lourd et le gazole marin, sur différentes places. En juillet 2017, chacun de ces produits était affiché à 27, 41 et 63 dollars le bep en Europe, 36, 43, 79 dollars au Canada, 15, 41 et 62 dollars aux Etats-Unis, 29, 47 et 78 dollars en Chine. Avec la hausse durable attendue sur le prix du baril de pétrole, l’écart en faveur du gaz naturel va encore s’amplifier, assure le cabinet de conseil.

Transport routier

Le GNL permet aux véhicules terrestres d’être parfaitement adaptés aux normes Euros 6 dont les limites sont désormais imposées eu Europe, aux Etats-Unis et en Chine. Sia Partners rappelle qu’il faut moins de 3 ans, avec un camion parcourant environ 100.000 kilomètres par an, pour réaliser suffisamment d’économies sur le carburant afin de gommer le surcoût à l’achat d’un modèle diesel. Un des plus grands freins au développement de la mobilité routière au GNL, relevé par le cabinet, est un réseau d’avitaillement nettement insuffisant.


A ce jour, son évolution est « principalement porté par la Chine, qui concentre aujourd’hui 90% des stations-services mondiales de GNL », souligne l’agence. Si on ajoute à ce pays l’Europe et les Etats-Unis, on obtient les 3 acteurs qui représentent 99% du marché. « En Europe, le projet Blue Corridors témoigne du positionnement en faveur du développement du GNL comme carburant routier », rappelle le cabinet, qui évoque la création le long des grands axes d’une station tous les 400 kilomètres.

Importante segmentation

Sia Partners démontre dans son étude que le marché du GNL est très compartimenté en fonction des grands territoires. Concernant les constructeurs de camions alimentes au gaz naturel, on trouve : Iveco, Renault Trucks, Volvo, Mercedes-Benz, Scania et Daimler en Europe ; Freightliner, Kenworth, Peterbilt aux Etats-Unis ; CAMC, Sinotruck et Dongfeng en Chine. Idem pour les acteurs de l’avitaillement en GNL : Axégaz, LNG24, GNVert, Gas Natural Fenosa, et Rolande LNG en Europe ; BluLNG et Clean Energy aux Etats-Unis ; ENN, Sinopec, CNOOC et Petrochina en Chine.

Sia Partners modère son propos en indiquant que quelques constructeurs, dont Volvo et Daimler, tentent leur chance ailleurs, et que le chinois ENN est parti à la conquête du marché américain en créant une coentreprise avec BluLNG. Ce partenariat s’intéresse également à l’Europe, avec l’ouverture de sites aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne.

Le phénomène chinois

Le cabinet de conseil explique le dynamisme chinois par plusieurs facteurs : une industrie qui se fédère après le désengagement de l’Etat en 2015 dans l’attribution de subventions au GNL comme carburant routier, des camions et stations-service à bas coûts en raison d’une main-d’œuvre bon marché et d’un effet d’échelle important, un impact économique à l’usage le plus bas pour une alternative propre aux produits pétroliers lourds. En outre, le plus important avitailleur en GNL, Petrochina appartient à 86% à l’Etat, et ceux en 3e et 5e position sur le marché, CNOONC et Sinopec, sont exclusivement détenus par lui.

Forte progression à horizon 2030

Dans son étude, Sia Partners prévoit une hausse de la demande dans le secteur, passant de 2 millions de tonnes par an actuellement à plus de 26 à l’horizon 2030. « Cet usage représenterait alors plus de 5% de la demande globale de GNL dans le monde », traduit le cabinet. Du côté des véhicules, un renouvellement relativement rapide des flottes estimé à une cadence comprise entre 6 et 10 ans est de nature à fortement soutenir l’introduction en masse des modèles fonctionnant au GNL.
 

Transport maritime

La situation est quelque peu différente dans le transport maritime, où la filière est aujourd’hui principalement concentrée en Europe du Nord (75% en mer Baltique). Mais elle va évoluer sous la pression de la décision prise en octobre 2016 par l’Organisation maritime internationale. Un plafond en teneur en soufre a été fixé à 0,5% pour l’ensemble des carburants à partir du 1er janvier 2020, applicable au globe. De quoi doper les politiques de développement du GNL et des infrastructures d’avitaillement en Europe, comme en Asie et aux Etats-Unis.

« Bien que le transport maritime traverse actuellement une crise, la demande de GNL comme carburant marin pourrait atteindre plus de 29 millions de tonnes par an en 2040, soit 13% de la consommation mondiale de carburant marin », estime Sia Partners. Le cabinet prévoit une augmentation importante des besoins globaux en GNL comme carburant marin, qui passerait « de moins de 0,5 million de tonnes par an actuellement, à plus de 22 à horizon 2030, représentant ainsi entre 9 et 11% de la demande mondiale ».

Similitudes

A nouveau, Sia Partners met en avant une compensation sur 1,5 à 4 ans du surcoût matériel, grâce à « un coût d’exploitation réduit de moitié ». Le développement de la solution GNL pour le transport maritime implique également un déploiement des infrastructures d’avitaillement, cette fois-ci dans les principaux ports de la planète.

Les investisseurs pourraient se rassurer avec l’accélération du nombre de navires carburant au GNL, qui a franchi les 100 exemplaires en service ou en cours de construction. Des chiffres qui paraissent peut-être un peu chiche, mais qui au contraire se révèlent encourageants dans un secteur où le renouvellement des véhicules est lent. La durée de vie moyenne d’un navire est en effet comprise entre 25 et 40 ans.

Perspectives

Sia Partners s’attend, à horizon 2030, à une demande totale de GNL carburant, marin et routier confondus, d’environ 40 millions de tonnes par an. Le cabinet souligne la réorientation prise par certains pétroliers, comme Total, qui montre l’intérêt que la filière suscite chez les acteurs historiques de la distribution des produits fossiles. Dans les conclusions de son étude, le cabinet accorde une large place au bioGNL, qui sera obtenu de la liquéfaction de biométhane pour un impact encore plus vertueux au service de la mobilité à gaz de demain. Toutefois, le coût de production de ce gaz, qui bénéficie peu des économies d’échelle, impose parfois des scénarios particuliers, comme en France où il est conseillé de l’injecter dans le réseau pour en retirer un meilleur rendement financier.



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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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