Il convertit une Renault 4 au biogaz pour 5 000 euros

Il convertit une Renault 4 au biogaz pour 5 000 euros
Second volet de la rencontre avec Théophyle Mini, ce nouvel article fait le point sur la conversion des Renault 4L pour les alimenter avec du biogaz issu de la Méthanisation. Nous vous proposons ici plus particulièrement les photos des éléments ajoutés sur le véhicule.

Ingénieur en agro-écologie et agriculture biologique, Théophyle Mini a d’abord pensé à la conversion au GNV des moteurs thermiques pour gommer l’empreinte carbone de son activité de parachutisme. Avant d’adapter les avions, il a converti une R4 fourgonnette F6 qui participera au 4L Trophy du 17 au 27 février 2022. Deux autres équipages de l’association 4LTerre’Native sont inscrits, qui rouleront également autant que possible avec du gaz issu de la méthanisation agricole. Cette participation offre une vitrine au rétrofit au GNC des véhicules anciens et considérés désormais comme trop polluants et émissifs en CO2 par l’administration française.

La moitié du prix dans le réservoir

« Pour participer au 4L Trophy, j’ai recherché une fourgonnette F6 - la plus spacieuse - peu kilométrée. J’ai trouvé cet exemplaire vitré avec moins de 70 000 km au compteur. Il a d’ailleurs passé ce seuil symbolique le jour où elle a été convertie au gaz naturel », lance Théophyle Mini. « Effectué par Eric Sortino dans les Landes, la modification de la fourgonnette a mobilisé un budget de 5 000 euros, dont la moitié pour le seul réservoir », calcule-t-il. 

D’une contenance de 87 litres, ce réservoir a été installé transversalement dans le coffre du véhicule, tout juste derrière les sièges. « A vide, il pèse 25,5 kg. Les 14,5 kg de GNC qu’il peut contenir sous 200 bars de pression dotent notre R4 F6 d’une autonomie au gaz de 350 km. Plein, le réservoir alourdit au total le véhicule de 40 kg », chiffre notre interlocuteur. Sans compter le cylindre métallique de protection qui entoure le contenant.

Du réservoir au vapodétendeur

Le bouchon de remplissage a été placé au dessus du feu arrière droit. « Au départ, Sortino pensait le mettre tout en bas, au niveau du pare-choc. Le remplissage aurait été moins facile à effectuer », commente Théophyle Mini.
 

L’accès au réservoir est protégé par un robinet bleu manuel et une électrovanne. « La conduite métallique qui achemine le gaz jusqu’au vapodétendeur passe en dessous du véhicule, sans protections particulières. C’est déjà ainsi d’origine pour l’arrivée d’essence », commente le chef de projet compensation carbone chez Carbonapp.


Le vapodétendeur, c’est cette sorte de disque en alliage dont le rôle est de convertir la pression de stockage du GNV à celle d’utilisation dans le moteur. « Il a été placé de cette façon pour un fonctionnement optimal », souligne notre interlocuteur. Dessus, un manomètre indique la pression d’arrivée du gaz. Sur la photo, on peut lire la valeur conforme de 200 bars.


85 km d’autonomie par diode allumée

Une dérivation du circuit de refroidissement d’origine de la 4L a été ajoutée en direction du vapodétendeur. Elle sert à réchauffer le gaz à une température idéale d’exploitation. C’est pourquoi le démarrage du moteur, ici un Cléon 1 108 cm3, s’effectue impérativement à l’essence. La bascule est réalisée grâce à un interrupteur placé discrètement au tableau de bord. 

Tout juste en dessous de lui, 4 diodes témoignent du niveau de gaz dans le réservoir. Lorsque les 4 sont allumées comme sur la photo : il est plein. « Chaque diode représente une autonomie de 85 kilomètres », précise Théophyle Mini.

Une arrivée en parallèle

Une sonde lambda a été ajoutée au niveau du pot d’échappement. Elle transmet la valeur de la richesse des gaz de sortie du moteur. Un boîtier avec diode sous le tableau de bord rapporte au conducteur cette information. Le témoin est vert si la richesse est correcte. Il devient orange et même rouge dans le cas contraire. 


Un calculateur joue le rôle de régulateur en agissant sur le moteur pas à pas du doseur de gaz. « Du fait de 2 fuites au pot d’échappement, la sonde lambda envoie des valeurs qui ne sont pas exactes. Nous allons régler ce problème rapidement », explique Théophyle Mini.

Avant d’arriver au moteur, les circuits d’alimentation en gaz et en essence poursuivent un bout de route en parallèle, chevauchant le cache-culbuteurs. La photo montre comment l’arrivée du GNV traverse le support de filtre à air pour rejoindre le carburateur. En amont, une électrovanne ouvre ou ferme la circulation du gaz, selon la position de l’interrupteur au tableau de bord.


Une installation témoin

Cette installation qui permet à la R4 F6 de fonctionner au bioGNV, Théophyle Mini et ses amis réunis au sein de 4LTerre’Native comptent la dupliquer. Déjà 3 équipages sont engagés pour participer à la prochaine édition du 4L Trophy avec des modèles convertis au gaz naturel. 

Pour l’association, cette vitrine montre que cette opération est réalisable à grande échelle sur les voitures anciennes. Pour un coût maîtrisé, leurs utilisateurs pourront accéder aux zones à faibles émissions. La transformation permet en effet de classer les véhicules en Crit’Air1. 4LTerre’Native a lancé le programme Biogaz4Life qui vise à « démocratiser le rétrofit des voitures polluantes pour les convertir au bioGNC ». 

L’appel est ainsi lancé à destination de tous les propriétaires de cette mythique citadine minimaliste du Losange. Mais aussi des autres modèles trop rapidement sacrifiés au nom de la prime à la conversion. Parce qu’il prolonge la vie d’un véhicule et évite la construction d’un nouveau, le rétrofit pèse de façon bien plus légère sur l’environnement que la mise à la casse d’un modèle en état de rouler.

Une remorque à venir ?

Théophyle Mini n’a pas terminé de préparer son véhicule pour le 4L Trophy. Il souhaite fiabiliser la mécanique, notamment en étanchéifiant la ligne d’échappement, ainsi que le moteur par remplacement des joints. 

Il espère surtout pouvoir disposer d’une petite remorque qui embarquerait 4 bouteilles de 80 litres de gaz, un compresseur et un panneau solaire. Cet attelage, dont il évalue le budget à 15 000 euros, permettrait de recevoir 50 kg de GNV. De quoi traverser le désert pendant le rallye. Cette idée illustre la volonté jusqu’au-boutiste de l’ingénieur qui souhaite que se développe le ravitaillement en biogaz hors réseau. 

Comme le Petit Poucet, il balisera le chemin au Maroc en déposant à chaque étape des micro-méthaniseurs en poche souple. Les populations locales pourront y verser par exemple les déjections d’animaux comme les chameaux et dromadaires, les restes des repas et de l’huile de friture usagée. Il suffirait d’un compresseur embarqué dans une voiture afin de pouvoir exploiter pour la mobilité le gaz ainsi produit. Ces installations profiteront d’abord et surtout aux riverains pour, par exemple, la préparation du thé et des repas.

A la recherche de partenaires

Aujourd’hui, Théophyle Mini est à la recherche de partenaires qui pourront l’aider à poursuivre ses projets. 

En plus de soutiens financiers, il souhaite être assisté techniquement. Déjà pour fiabiliser les 4L qui vont participer au rallye. Ensuite en étant formé aux opérations de conversion au GNV. Et ce, dans la perspective de créer un réseau de rétrofit pour 4L, avant de s’étendre éventuellement à d’autres modèles. Notre interlocuteur compte sur un fabricant de réservoirs qui pourrait lui fournir un modèle de 120 litres et le rack de 4 bouteilles à installer dans la remorque. L’idéal serait bien sûr qu’un spécialiste prenne en charge la réalisation complète de l’attelage.




Remerciements : Gaz Mobilité et moi-même remercions à nouveau Théophyle Mini pour son témoignage. Un grand merci également à son partenaire Karrgreen représenté lors du reportage par sa chargée de communication Maëlynn Weber. Grâce à elle, le plein du réservoir de la R4 F6 a pu être réalisé devant nous à Ploërmel alors que la station n’était pas encore officiellement ouverte au public. L’établissement est en particulier dans l’attente de documents obligatoires à afficher sur le site.

 

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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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3 Commentaires

  1. GIRAUDPublié le 25/10/2021 à 14:11

    J’ai lu dans le journal "l’Est Républicain du samedi 23/10/21, que Kéolis Territoires Nancéens prévoit d’acheter, en 2022 : 14 bus au GNV qui seront mis en service, en janvier 2023.

  2. espouPublié le 01/11/2021 à 16:28

    Bonjour,
    Je suis très surpris par votre article ,j’ai déjà équipé au GNV une Renault 4F6 il y a 40 ans !!!! en plus simple et surtout bien moins cher ! Les bouteilles Faber de 33 litres sur une galerie (pour ne pas perdre de place ) un picage au carburateur et un détendeur ETNA a trois étages .
    J’ai équipé plusieurs véhicules Estafette ,R8 plusieurs R16 .
    Ce procédé n’est pas nouveau ici (dans l’Ariège )on roule au méthane comprimé depuis 1939 a l’époque même les camions .
    Si vous avez besoin de renseignements sur le sujet je suis a votre disposition .
    Cordialement

  3. CharybdisPublié le 15/01/2022 à 22:59

    Je vais tenter de répondre à Espou point par point.
    Le GNV n’est pas une nouveauté c’est une évidence.
    En ce qui concerne le positionnement des bouteilles façon gazogène sur le toit, comme la règlement dracodienne ne le permet pas, mieux vaut s’abstenir.
    En revanche, ce qui n’existait pas il y a 40 ans, c’est notamment le réservoir composite ULLIT, ultraléger (mais ultra cher), ainsi que l’ajout de la sonde lambda permettant de corriger le mélange air/gaz en temps réel via un boitier électronique, pour un fonctionnement optimal et surtout une maîtrise des émissions, car aujourd’hui l’approximation n’est plus de mise.

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