Panorama du bioGNV 2022 : la filière française défie l'Europe, chiffres à l'appui

Panorama du bioGNV 2022 : la filière française défie l'Europe, chiffres à l'appui
Pour la troisième année consécutive, l’AFGNV diffuse un état des lieux annuel du bioGNV en France. Ce panorama montre, qu’en dépit de l’immobilisme de l’Europe, ce carburant alternatif déjà prêt à l’emploi et très efficace pour décarboner la mobilité, bénéficie d’un développement soutenu en 2022.
 
La publication du panorama 2022 du GNV intervient dans un contexte marqué par le règlement concernant les émissions de CO2 des véhicules routiers lourds. Au niveau de la Commission européenne, la proposition soumise en février dernier ne s’attache qu’à ce qui se passe au pot d'échappement des engins. A ce jeu, seuls l’électrique à batterie et l’hydrogène peuvent se distinguer. Si elle était confirmée au terme d’un processus qui devrait nous emmener jusqu’au premier trimestre 2024, cette position biaisée condamnerait le bioGNV.
 
Deux points en particulier alourdissent la situation. Tout d’abord le renouvellement des députés européens qui doit être lancé peu après la validation par le Parlement. Ce qui risque de précipiter un bouclage du texte sans prendre le temps nécessaire à mieux formuler les vrais enjeux et les moyens de les prendre en compte. Deuxième point qui empêche de céder à une certaine sérénité : l’échéance de 2030 pour des bus neufs à zéro émission.
 

Analyse du cycle de vie

On aura beau retourner le problème dans tous les sens, seule une analyse du cycle de vie est acceptable pour fixer des contraintes concernant les émissions de CO2 des poids lourds. Dans ce cas, comme le rappelle dans son édito de présentation du panorama Erwan Cotard, président de l’AFGNV, le gain par rapport au diesel est de l’ordre 80 %. Dans le détail, le document qui a été publié le 13 juin 2023 souligne les conclusions de plusieurs études. En particulier celles réalisées par l’IFP Energies nouvelles en 2019 et par Carbone 4 l’année suivante. La réduction serait plus précisément de 76,68 %, contre seulement 67,68 % pour l’électrique à batterie.
 
Plus récemment, l’Ademe a démontré que le gain serait même supérieur, dès lors qu’au bout de 10 ans, à la place de changer d’utilitaire, de camion ou d’autocar diesel, le moteur serait rétrofité pour fonctionner au bioGNV. A la clé, 6 à 12 points de pourcentage en mieux. Les performances environnementales de ce carburant gazeux plus vertueux s’appuient en particulier sur le CO2 absorbé par les végétaux qui entrent dans le procédé de méthanisation et compensent ce qui sort à l’échappement.
 

La filière ne baisse pas les bras

Une fois ce contexte rappelé, les résultats du panorama établi par l’AFGNV prennent un sens très symbolique. On pourrait s’attendre à lire des chiffres catastrophiques. Il n’en est rien, signe que des acteurs impliqués dans le bioGNV et la méthanisation ne baissent pas les bras.
 
Très diversifiés, ce sont des territoires, collectivités, syndicats de l’énergie, gestionnaires des réseaux gaziers, agriculteurs, transporteurs, l’Ademe, etc. Tous multiplient actuellement les actions pour faire comprendre aux eurodéputés : Attention, vous vous apprêtez à commettre une immense bévue au niveau de l’environnement, de la santé publique, du dérèglement climatique, de la souveraineté nationale, de l’économie circulaire, du développement des régions, etc. si vous persistez dans une voie erronée. Quelle comparaison pourrait-on donner pour que ce soit plus compréhensible ? Par exemple de dire que des pommes sont bios parce qu’elles n’ont pas reçu de traitement après cueillette, en oubliant la vingtaine de pulvérisations quand elles étaient encore sur l’arbre.
 

Un dynamisme bien visible dans les consos…

En hausse de 30 %, 4 118 GWh de GNV ont été consommés dans l’Hexagone l’année dernière. Dans le détail, il s’agissait du cumul de 2 968 GWh de GNC et de 1 150 GWh de GNL.
 
En dépit des perturbations générées par les fortes variations des prix aux distributeurs consécutives aux tensions sur les marchés de l’énergie, « en cinq ans, les ventes de BioGNV/GNV ont été multipliées par 2,5 et celles de GNL, utilisé pour les transports longue distance, ont été multipliées par 3 ».
 
Le dynamisme des courbes des consommations n’empêche pas qu’en parallèle la part du bioGNV progresse également fortement. Elle a tout simplement doublé en passant de 13 % en 2021 à 25,9 % l’année dernière pour un volume de 1 065 GWh de bioGNC. A l’échelle du seul GNC, on en est même à plus de 36 %.
 
La filière s’attend à faire grimper en France la proportion de bioGNV dans le GNV à 50 % pour 2025 et 100 % dès 2033. Le GNL va également débuter son processus de verdissement. Puisqu’il est encore nécessaire de le faire, l’AFGNV souligne que Le BioGNV est « un carburant de deuxième génération » dont « la production n’entre pas en concurrence avec la production alimentaire ».

 

…les ouvertures de nouvelles stations…

Si les ventes de GNV grimpent, c’est que les véhicules compatibles sont de plus en plus nombreux sur nos routes et que le réseau d’avitaillement s’étend. Au point que ce dernier a déjà dépassé les objectifs européens et nationaux.
 
Avec 95 nouvelles stations raccordées au réseau GRDF, le maillage comprenait 650 stations fin 2022, dont 350 établissements privés réservés aux flottes captives de collectivités ou de transporteurs. Etaient accessibles au public 301 stations, totalisant 224 points d’avitaillement en GNC (48 %), 169 en BioGNC (36 %) et 77 en GNL (13 %). L’AFGNV précise : « Une station délivrant du GNC et du GNL compte dans les statistiques officielles comme deux points d’avitaillement ».
 
En 2023, 66 programmes d’ouverture de stations publiques ont été recensés. Afin d’illustrer le dynamisme de la filière, le panorama indique : « En considérant les projets publics et privés, deux nouvelles stations sont mises en service chaque semaine ». Mais aussi que « la France détient le plus vaste réseau d’avitaillement d’Europe pour les poids lourds en BioGNC/GNC et GNL ».
 
L’association des agriculteurs méthaniseurs de France (AAMF) espère déployer 500 stations BioGNV à proximité des unités de méthanisation en 2025. Elles serviraient déjà les besoins internes pour le matériel roulant agricole compatible, mais aussi les flottes captives locales, publiques comme privées. Huit étaient déjà opérationnelles en fin d’année dernière.

 

…et les ventes de véhicules

Bénéficiant de la vignette Crit’Air 1 qui permet d’accéder aux zones à faibles émissions, et en progression de 12 %, 34 243 véhicules fonctionnant au GNV/bioGNV étaient en circulation à fin février 2023. Parmi eux, une minorité de véhicules légers avec seulement 2 730 voitures particulières (8 %) mais 9 810 utilitaires (29 %). Ces deniers coiffent même, de peu toutefois, les camions (9 634 unités, 28 % de part, en progression de 44 % sur 2 ans).

 
Ces chiffres ne comprennent pas les bennes à ordures ménagères et autres véhicules spécialisés dont la part est de 12 % pour 4 286 engins. Le solde se compose de 5 764 autobus (17 %) et 2019 autocars (6 %). De 2016 à 2022, les nouvelles immatriculations de véhicules lourds GNV/bioGNV n’ont pas arrêté de progresser, passant de 520 à 3 912 unités supplémentaires. De quoi faire progresser ce parc de 4 600 à 19 000 engins dans le même temps.
 
Le mouvement est en particulier emporté par « la majorité des enseignes de distribution, mais aussi les messageries ou encore le BTP qui continuent de convertir une partie parfois non négligeable de leur flotte au bioGNV/GNV ». Plus d’un nouvel autobus sur 2 est avec motorisation GNV. Affichant le souhait de valoriser les déchets locaux, toutes les villes de plus de 200 000 habitants emploient ce carburant alternatif pour leurs transports en commun routiers. Le mouvement a pris également du côté des autocars avec une croissance de 46 % du parc GNV.

 

Focus divers

 Les poids lourds routiers en circulation en France sont dédiés au fret à hauteur de 60 %. Le reste concerne le transport de voyageurs. Dans la double page « Parole d’acteurs », l’AFGNV a mis en avant la volonté de Scania de persévérer très activement dans les motorisations GNV. « Pour notre part, le bioGNV représente la première énergie alternative au diesel. Et nous continuons à investir dans le développement de ces motorisations, comme en témoigne la sortie prochaine de deux nouveaux moteurs de 420 et 460 ch », communique le constructeur.
 
Une place a été également réservée à La Poste qui, à côté de l’électrification des véhicules légers, table sur le bioGNV pour les 10 prochaines années en alimentation des poids lourds. Cet espace s’est aussi intéressé aux organisations professionnelles de transport routier de marchandises. Elles appellent à un mix énergétique qui inclut le bioGNV parce qu’il « constitue un levier de décarbonation efficace » et que « l’autonomie est proche des motorisations diesel ».
 
Le bioGNV, c’est aussi pour le rail et les voies fluviales. C’est ce qu’a rappelé le panorama en citant en particulier le projet GreenDeliriver et les volontés régionales de convertir les TER à ce carburant alternatif.
 
 
 


Panorama du bioGNV 2022
Publié chaque année par l'AFGNV, le panorama du bioGNV dresse un état de la filière française.
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Philippe SCHWOERER Philippe SCHWOERER
Journaliste
Très tôt sensibilisé aux économies d'énergie, Philippe défend une mobilité durable plurielle à travers ses articles publiés dans plusieurs médias en ligne.

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2 Commentaires

  1. AlberiPublié le 19/06/2023 à 14:52

    Merci pour cet article, en effet c’est maintenant ou jamais qu’il faut défendre la pertinence du bioGNV devant le dogmatisme européen.
    Ce qui est vrai pour les poids lourds, l’est également pour les véhicules légers, il ne faut pas l’oublier. Le parc réduit des véhicules légers bioGNV est aussi invisibilisé par les mesures européennes de 2035, qui détournent les constructeurs de cette gamme et réduit encore la part des véhicules GNV.
    Dans cet article, les élections européennes sont présentées comme une date butoir pour ces démarches. Il faut agir dès maintenant, mais les élections européennes peuvent être aussi l’occasion d’interroger les divers partis sur leur position sur ces questions. Qui défendra l’Analyse en Cycle de Vie ? Et non ce zéro-émission en dehors du bon sens....

  2. AlberiPublié le 19/06/2023 à 15:26

    Se soucier des véhicules légers dans le même élan que les transports lourds aurait une autre vertu. Associer les citoyens au bénéfice du bioGNV, ce qui pourrait faire évoluer les esprits et les dynamiques lors des projets d’installation de méthaniseurs, si ces projets peuvent se coupler avec des stations bioGNV accessibles aux véhicules de tous.

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